samedi 16 juillet 2011

Le beau temps ne dure pas éternellement... (7) Quand la fessée se prolonge en tannée...

SUITE 6

Deux BN et un verre de lait m'attendaient sur la table de la cuisine. J'aurais dû être contente. Maman n'était pas trop gâteaux tout faits, et nous avions la plupart du temps des tartines de vrai pain, avec beurre et confiture, ou compote, les BN et autres produits industriels n'étant que pour quelques jours de ci de là, notamment pour nous faire plaisir.
Ce 23 mai, ils ne me consolaient pas de ma triste position. Et même des BN, j'avais du mal à les avaler.
Maman était rentrée avec une pile de linge sec et s'installa sur la table de la salle à manger pour trier ce qui était à repasser et ce qui était à ranger directement.
"Tu n'as pas encore fini ton goûter, Christine. Décidément, tu es bien lente ce soir... Allez, dépêche-toi. Tu mettras ton verre dans l'évier et tu viendras me voir. Je t'attends dans le salon..." avait-elle lancé au passage.
Dans le salon, maintenant ? C'était ce qui ressortait de sa phrase. J'aurais préféré qu'elle dise : on en parlera ce soir, dans ta chambre, avant de dormir. Mais, ce n'étaient hélas pas les désidérata d'une Christine qui faisaient la loi à la maison...
Et puis, depuis que je craignais ce moment, j'étais devenue fataliste, j'avais presque envie qu'on en finisse.
Le salon, cela faisait plus solennel que ma chambre, mais tant que mes soeurs jouaient dehors, cela restait assez intimiste, et mieux valait ne pas trop faire attendre Maman dans ce cas.
J'avais la gorge sèche, et les trois dernières gorgées de lait tiède m'ont fait du bien, petit moment de douceur précédant l'orage.
J'hésitais à sortir de la cuisine, à faire les quelques pas vers le salon. J'aurais voulu arrêter le temps, ou alors être déjà à demain. Mon regard se posa sur le grand calendrier accroché au mur à côté du réfrigérateur. Un de ces calendriers qui affichent six mois de l'année et qu'on retourne en été. Maman y inscrivait certaines dates, comme des pense-bête. Des rendez-vous pris à l'avance chez le médecin, des dates de vacances, etc.
Je regardai ces dernières semaines. Il y avait "Coiffeur" le 10 mai, Voyage scolaire Diane le 15 juin, etc. Et puis, tiens, "Christine à l'anniversaire d'Anne" dans la case du 16 avril...
Mais, pour moi, c'était surtout ce qui m'attendait au retour qui restait dans ma mémoire... A quoi je pensais depuis que j'avais cassé le feutre...
Aujourd'hui, à la case du 23 mai, il n'y avait rien, il n'y aurait rien, mais moi dans ma tête je la marquais d'une croix...



"Christine, qu'est-ce que tu fabriques ?", la voix maternelle me sortit de ma torpeur rêveuse ou plutôt cauchemardeuse...
"Euh, j'arrive, Maman, j'arrive..." dis-je en me dirigeant vers le salon-salle à manger. Maman y était assise sur une chaise qu'elle tourna et dégagea de la table sans se relever totalement.
Je m'arrêtai en voyant qu'elle me présentait ses genoux. D'un index, elle faisait le geste m'invitant à venir vers elle.
"Maman, s'il te plait, tu sais, euh, je te demande pardon, je ne voulais pas, euh, tacher tes vêtements..." plaidais-je avec une voix doucereuse et sanglotante.
"Christine, allez, viens ici, il n'y a rien à discuter. Tu as largement mérité cette fessée et tu sais bien que tu n'y échapperas pas. Alors, ne m'énerve pas davantage.." répliqua-t-elle d'un ton sec et courroucé.
J'aurais plutôt d'habitude encore chigné et me serais faite prier davantage avant de venir vers elle, mais là, peut-être consciente de l'étendue des dégâts de ma bêtise, je me suis approchée tête basse comme un mouton obéissant.
A peine ai-je eu une sensation de vertige, de trouille avant de plonger en travers de ses cuisses, attirée d'un bras ferme par Maman qui m'avait attrapé le poignet.
Je n'ai même pas dit un mot tant qu'elle dégagea ma jupe, la remontant bien dans mon dos, et je me surpris à ne pas tenter de dégager mon bras pour essayer de l'empêcher de baisser ma culotte. Non, j'ai seulement psalmodié un "Non, non, Oh, Maman, non, non" presque timide, presque à mi-voix, sans conviction.



"Oh, si Christine, oh que si...", répondit Maman à qui ma semi-passivité ne devait pas déplaire, et qui en profitait pour parfaire son oeuvre, pour dégager parfaitement la cible de son courroux, pour prendre le temps de bien me mettre en position avant de donner les premières claques...
"Ah, tu l'as bien cherchée, celle-là, Christine. Mais, tu ne vas pas être déçue, crois-moi", dit-elle, toujours sans avoir levé la main pour l'abattre sur ma lune qui tremblait, encore toute blanche et sans plus aucune protection...
Je tentai de l'amadouer : "Oh, Maman, ne sois pas trop dure. C'est une grosse bêtise, oui, mais je suis sage depuis longtemps, tu sais".
Comme toujours, mon argument tomba à plat...
"Oh, ce n'est pas une raison, ma fille. Je veux bien admettre que cela fait quelque temps que tu as échappé à la fessée, mais il s'en est fallu de peu deux ou trois fois. C'est même à se demander, pour avoir fait une telle bêtise, si cela ne te manquait pas. Eh bien, je vais te rafraichir la mémoire si tu ne te rappelles plus ce que c'est qu'une bonne fessée, Christine..."
J'aurais mieux fait de me taire finalement, ce rappel que je n'en avais pas reçue depuis un certain temps ne faisait que remonter la détermination maternelle.
Parce que me rappeler, ça oui, je me rappelais, et n'avait pas besoin d'une nouvelle fessée pour me souvenir de la dernière. Maman, elle, ne l'avait peut-être pas précisément en tête, mais moi je me voyais comme si c'était hier, ce 16 avril au soir, dans ma chambre, pyjama baissé, déculottée sur les genoux maternels.
Cela faisait un mois et sept jours, et mes fesses étaient écarlates, brûlantes, claquées méthodiquement. 37 jours plus tard, mes fesses étaient à nouveau offertes à la dextre maternelle, encore blanches, encore fraiches, mais plus que pour quelques instants... Ca y est, la si longue pause s'achevait dans un bruit mat... La fessée, ma fessée tombait, enfin, oserais-je dire...




Je serrai les dents, alors que les claques pleuvaient. Maman était remontée, décidée à donner une fessée mémorable. Je le savais, je le sentais dès les premières claques, il y avait de l'application, de la volonté de corriger sa fille comme elle le méritait.
Je tentais de retenir mes larmes, j'étouffais au maximum mes cris, ne voulant pas rameuter mes soeurs, ni alerter le quartier.
Comme dans ces cas où la punie a conscience qu'elle ne l'a pas volée cette fessée, je prenais l'averse avec une sorte de dignité, tant que la douleur ne me faisait pas passer au registre des cris aigus.
L'histoire était moins "parlante" qu'entre d'autres moments, même si la fessée s'entrecoupait de ces petits monologues maternels rappelant la faute, répétant que j'allais m'en souvenir, etc., etc.
C'était une fessée marquante, longue et précise, me "tannant" le moindre centimètre carré de mes rondeurs jumelles...
Après de longues minutes, Maman desserra un peu l'étreinte, mais sans me relâcher. Comme si elle jaugeait son oeuvre, se demandait si cela suffisait. Je restai immobile. Je sentais qu'il valait mieux ne rien dire, mais un "Maman, snif, snif, ça suffit, snif" m'échappa, et lui permit de rebondir...
"Tais toi, Christine. Ce n'est pas toi qui commande. Ah, tu l'as bien méritée cette fessée. Pour ta bêtise et pour m'avoir menti... Quand je pense que tu m'as caché ça, au lieu de me le dire. Si encore, tu m'en avais parlé avant que ça sèche, au lieu de le dissimuler. Franchement, je me demande quand tu comprendras Christine. Ah, je voyais bien depuis ce week-end, peut-être même depuis vendredi que tu n'avais pas la conscience tranquille. Je te sens, Christine, et malgré ça, tu continues à faire tes cachotteries en croyant que tu échapperas à ce que tu mérites... Mais, non, tu vois, Maman arrive toujours à savoir... Ah, Christine, rien que pour ça, tu mériterais une autre volée..."
Et, me bloquant à nouveau complètement, Maman se remit à claquer ma lune, avec une énergie renouvelée. C'était moins précis, moins appliqué qu'avant sa tirade, mais on sentait une colère rentrée qui s'exprimait, me donnant un supplément de claques plus que généreux, presque comme une fessée supplémentaire. Surprise par cette ardeur nouvelle au moment où je m'attendais à être libérée, à être débarrassée, je réagis plus vivement qu'avant, me mettant à crier, ne pouvant retenir mes gémissements, mes protestations, il est vrai que cette claquée finale s'abattait sur une lune déjà écarlate et qu'elle avait une vivacité propre à raviver la douleur.
Je gigotais sans pouvoir empêcher Maman de parachever sa correction. Elle, bien décidée à ce que la leçon soit retenue, claquait et claquait encore en menaçant : "Ah, Christine, j'en ai assez de tes mensonges. Tiens, tiens, tiens et tiens, et ça sera ainsi à chaque fois que tu me mentiras. Réfléchis bien avant de recommencer, sinon je n'ai pas fini de m'occuper de tes fesses..."
La "bonne fessée" annoncée tournait à la "tannée mémorable" et s'achevait par l'épuisement des combattants. Le bras de Maman décocha encore quelques dernières claques que je reçus sans plus même me débattre, calmée que j'étais par cette volée.
En détournant la tête vers la porte-fenêtre du salon, au moment où Maman desserrait son étreinte et tapotait ironiquement ma lune rougie en disant "Allez, c'est fini, rhabille-toi", j'aperçus deux têtes collées contre la vitre. Aline et Diane regardaient la scène avec des grands yeux pétillants. Depuis quand étaient-elles en position de guet ? Je ne le savais pas, mais je me doutais bien qu'elles n'avaient pas dû louper grand-chose, d'autant que la fenêtre proche était entrouverte et devait diffuser aussi la bande son, si j'ose dire.
Quand Maman, qui leur tournait le dos, se releva de sa chaise, les petites disparurent. Sûr qu'elles avaient emmagasiné de quoi se moquer de leur ainée un bon moment...

7 commentaires:

  1. Ah comme de coutume les détails pittoresques abondent, Christine. Les BN, ça nous ramène aux années 70. Maman trie le linge et son aînée range le verre dans l'évier. Et ce calendrier « qu’on retourne en été » et qui lui même nous livre quelques plages quotidiennes, mais pas les fessées qui pourtant restent inscrites dans la mémoire de Christine…
    La description de cette fessée, d'ailleurs, manquait à mon goût de précision. J'ai trouvé que vous ne vous en êtes tenue qu'à des généralités. Mais peut-être que les détails que j'attendais, vous les avez déjà livrés dans des récits antérieurs et que vous n'avez pas voulu les répéter.
    Je ne sais pas... je m'étais attendu à une narration ralentie et traduisant mieux l'angoisse et la douleur de la punie, avec des phrases du genre : « La première claque est tombée sur ma fesse gauche, sèche, drue, impitoyable. J'ai retenu avec peine un hoquet de douleur tandis que mon vertige d'angoisse se muait en une frayeur presque palpable. D'ordinaire, le premier coup donnait le diapason, annonçait l'intensité de la fessée, et avec une entrée en matière aussi vigoureuse, je savais que le pire était à venir : la tannée qui s'annonçait allait vraiment être d'anthologie. Le deuxième coup, frappa ma fesse droite avec la même intensité. Sans avoir à me retourner, je savais que les doigts maternels avaient laissé une empreinte rose sur mon épiderme. J'ai su dès lors qu'il m'allait être difficile de garder un semblant de dignité. » ou, pour décrire la fin : « La fessée avait repris alors que je la croyais terminée ! Maman continuait à claquer mes fesses pourtant déjà brûlantes et écarlates, ce qui ne m'arrivait que pour les fautes exceptionnelles ! Cette fois, plus question de dignité, et les sanglots contenus à grand-peine éclatèrent en carillon dans ma gorge, tandis que, abdiquant définitivement toute fierté, à grands cris désarticulés, par des bribes de phrases et des mots hachés et incohérents, je suppliais Maman de me laisser, lui promettant n'importe quoi, véritablement prête à tout pour que cesse la claquante avalanche. Mon imagination se mit à galoper, je me figurais que Maman ne s'arrêterait jamais, que je n'allais plus pouvoir m'asseoir de toute ma vie... Folle de douleur et de panique, je battis des jambes comme une fillette, essayai en vain de me dégager de l'étreinte maternelle, mais de son autre main qu'elle fit peser de toute sa force sur mon dos, maman me maintint irrévocablement sur ses genoux, et termina cette tannée d'anthologie par une série terriblement appuyée qui m'arracha d'ultimes et pitoyables supplications, dans lesquelles je reconnaissais des formulations qu'utilisaient mes petites sœurs en de pareilles circonstances. »
    Enfin bref, vous voyez ce que je veux dire Christine, et à mes errements je sais très bien que vous n'avez qu'à répondre : « Puisque vous vous débrouillez si bien, Mardohl, que ne rédigez-vous vos récits vous-même plutôt que de vous plaindre des miens ? » Ce à quoi je répliquerai : « Je n'en ferai rien chère Christine, je ne prétends pas vous usurper votre plume, je me permettais simplement un commentaire constructif et je continuerai à vous lire avec un plaisir sans cesse renouvelé. »

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  2. Mardohl fait les questions et les réponses, et même mes commentaires supposés, hihi... Mais je ne me plaindrai pas : cette contribution est dans le ton de mon texte, très complémentaire et elle imagine bien ce que fut cette fessée et mon ressenti.
    Cela dit, cher Mardohl, je n'ai pas dit mon dernier mot à son propos. Je n'ai pas mis à suivre, mais pas "fin" non plus. J'avais l'intention d'y rajouter une paire de chapitres, autour de mes réflexions à chaud, de ce qui me marquait dans les minutes suivant cette déculottée magistrale et à propos des réactions des uns et des autres sur cet événement.

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  3. Ne vous en privez pas, Christine !

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  4. J'aime ces "fins" sans fins, Christine ... j'espère que vous avez toujours l'intention de nous faire part de celles que vous évoquez dans ce commentaire.
    Et merci, à nouveau, pour ce récit.

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  5. Bonjour Christine.

    Je vous dis : "Bonne fête !" avec deux jours de retard, car j'étais en vacances.

    Pas de mauvais jeu de mots, je parle au sens propre, même si votre maman, tout comme la mienne, vous "faisait votre fête" beaucoup plus qu'une fois par an.

    Je viens de lire aujourd'hui tous vos récits depuis fin juin, à mon retour de vacances. Je dis encore bravo pour tous ces souvenirs narrés, qui en évoquent sûrement de similaires pour de nombreux lecteurs ou lectrices.

    Amicalement, à bientôt.
    Fesseusement vôtre.

    Louis3901
    gallie050753@yahoo.fr

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  6. Bonjour Christine.

    Pauvre Christine, vous n'avez vraiment pas de chance, vis-à-vis de vos soeurs ! Je me souviens qu'un jour, vous nous racontiez que vous vous étiez cachée pour assiter, bien placée, à une fessée d'Aline. Et vous vous étiez fait prendre parce que vous aviez fait malencontreusement du bruit, ce qui vous avait valu à vous aussi une bonne fessée juste derrière Aline.

    Et dans votre dernier récit en date, vos chères soeurettes, elles, assistent au spectacle sans se faire prendre ! Mais si votre fessée était amplement méritée, je me sens obligée de vous plaindre, à cause de la scène que vous avez offerte, bien malgré vous, à Aline et à Diane.

    Amicalement, j'attends la suite.
    Fesseusement vôtre.

    Louis3901
    gallie050753@yahoo.fr

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  7. Très belle histoire, avec quelques illustrations pertinentes (j'aime par exemple la première de l'histoire quand elles font du shopping, si banale...).
    C'est très bien écrit, bravo! : )

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