Tellement sous la pression psychologique des menaces maternelles en ce début d'année de redoublement, je m'étais sentie comme heureuse, comme soulagée, presque comme chanceuse de ne pas avoir récolté de fessée pour mon premier bulletin mensuel...
Mais, l'écho de la déculottée d'Aline m'avait rappelé combien la règle était plus que jamais en vigueur pour celles qui désobéissaient ou ne travaillaient pas correctement.
Mon sentiment de soulagement ne dura d'ailleurs que le temps d'une nuit. Le lendemain matin, en deuxième heure de cours, la prof de géo nous fit le coup de l'interrogation surprise, et je me sentis mal n'ayant pas révisé les leçons que j'imaginais avoir acquise depuis l'année précédente.
Le devoir était un questionnaire, simplissime et rapide, si l'on savait... Mais, les capitales et les fleuves des pays du continent américain, cela ne s'invente pas, si on les a oubliées...
Vingt questions, un contrôle rapide, et facile à corriger. Moins évident à remplir, même si l'on a mon imagination débordante...
Avec difficultés, j'ai rempli neuf cases, sachant déjà que je n'aurais donc pas la moyenne, mais je n'étais même pas sûre du reste.
J'avais donc la mine inquiète de retour à la maison à midi... Ce que Maman remarqua mais je jouai les innocentes en éludant ses questions. De toute manière, tant que je n'avais pas la note, je n'étais pas obligée d'inquiéter Maman à l'avance...
Je restai donc dans mon coin, peu causante, et cachant tant bien que mal mon angoisse, en me remémorant ce qui était arrivé à ma soeur la veille au soir et dont les bruits et éclats de voix demeuraient gravés dans ma tête...
Je me disais qu'il serait bien temps d'en parler quand la prof aurait rendu les copies... Sûrement lors du prochain cours de géo, vendredi, dans trois jours...
Mais, surprise pour surprise, ladite interrogation était si facile à corriger que la prof avait profité d'une heure sans cours en début d'après-midi pour noter nos copies.
Et comme nous l'avions à nouveau, mais pour un cours d'histoire, en dernière heure, elle nous les rendit, avec quelques commentaires bien sentis pour celles qui n'avaient pas la moyenne.
La redoublante que j'étais récoltant un 4, la prof avait barré ma copie d'une appréciation : "Leçons non apprises. Note déplorable. Il ne faudrait pas que cela se reproduise..."
Comment avouer cela à Maman en rentrant ? Je n'avais pas le temps d'y songer, puisque nous étions en dernière heure.
Un moment, sur le chemin de la maison, j'ai pensé pouvoir retarder l'annonce, n'évoquer qu'une interrogation que l'on aurait eu, et faire croire que, comme cela aurait été logique, nous aurions les résultats vendredi. Mais, le risque était que je sois démasquée si Maman rencontrait une copine ou une prof.
J'y ai bien réfléchi et j'étais presque prête à retomber dans mes travers de l'année passée, dans ma manie de gagner du temps avant l'inéluctable explication...
D'ailleurs, lorsque je me trouvai en face de Maman, et qu'elle me demanda si j'avais eu des résultats ou quelque chose à lui montrer, je grommelai un petit "Non, euh..." qui était quasiment inaudible...
La réaction de Maman, fronçant les sourcils, et me regardant droit dans les yeux, avec une moue lui déformant la bouche, et l'air de dire : "Je ne suis pas née de la dernière pluie, je sens bien que quelque chose ne va pas..." me ramena les pieds sur terre.
Heureusement, elle n'avait pas réitéré sa question, ni haussé le ton. Mais, j'avais lu dans son regard que je ne pourrais rien lui cacher ce soir, ou alors que je m'embarquais vers des ennuis majeurs...
Je balbutiai : "Euh, ah si, euh... Il faut que je te dise qu'on a eu une interrogation en géo..."
Je disais cela comme si je venais de m'en souvenir, comme si la mémoire me revenait... Toutefois, je sentais bien que je n'étais pas sur ce coup une bonne comédienne...
"Mais, c'était ce matin, le cours de géographie, non ?", rétorqua Maman, qui comprenait pourquoi j'avais semblé troublée à midi.
Je regardais le sol plus que le regard maternel, et je tortillais mes mains, comprenant que j'en avais déjà trop dit pour pouvoir reculer, et que le seule sortie possible était l'aveu complet...
Je rétorquai : "Ah, oui, l'interrogation était ce matin, mais on n'a eu les résultats que cet après-midi pendant le cours d'histoire..."
Maman avait deviné que cela n'allait pas être glorieux : "Bah, alors, Christine, qu'as-tu eu comme note?"
Pas capable de lui dire en face, je fouillai dans mon cartable pour en sortir la copie, comme si je ne savais pas exactement ce qu'il y avait dessus...
Maman leva les yeux au ciel en découvrant le 4 sur 20, et à nouveau en lisant l'appréciation... "Ah, je comprends mieux la petite mine que tu affiches depuis ce midi, Christine... Et je peux te dire que tu as raison de t'inquiéter..."
Maman leva les yeux au ciel en découvrant le 4 sur 20, et à nouveau en lisant l'appréciation... "Ah, je comprends mieux la petite mine que tu affiches depuis ce midi, Christine... Et je peux te dire que tu as raison de t'inquiéter..."
Je tentai de me justifier : "Tu sais, M'man, c'était une interrogation surprise, et, euh..."
Elle me coupa : "Et tu n'apprends tes leçons que lorsque tu sais que tu seras interrogée, peut-être ? C'est inadmissible, Christine. 4 sur 20, dans une matière où il n'y a même pas à réfléchir, où l'on a juste à apprendre, je ne peux pas l'accepter, ma fille. Je t'ai assez prévenue, alors tu sais ce qui t'attend..."
J'ai grimacé, j'avais envie de dire : "Non, Maman, s'il te plait, je vais me rattraper, je vais bien travailler, mais je t'en prie, pas la fessée, pas la fessée..."
Mais, rien n'est sorti de ma bouche. Comme si c'était une évidence, comme si je savais que je n'y échapperais pas. Et je le savais d'ailleurs, tout comme Maman, déterminée et inflexible. Tout comme Aline, spectatrice de la scène, partagée entre la compassion et une sorte de soulagement que sa grande soeur soit cette fois la vedette de la soirée...
Mais, rien n'est sorti de ma bouche. Comme si c'était une évidence, comme si je savais que je n'y échapperais pas. Et je le savais d'ailleurs, tout comme Maman, déterminée et inflexible. Tout comme Aline, spectatrice de la scène, partagée entre la compassion et une sorte de soulagement que sa grande soeur soit cette fois la vedette de la soirée...
"Ne reste pas figée comme ça. File dans ta chambre et fais tes devoirs. On réglera nos comptes plus tard...", l'ordre maternel ne souffrait aucune discussion. J'ai obtempéré, presque soulagée de ce délai, comme s'il était un cadeau. C'est vrai que dans ce genre de situation, entre être punie sur le champ ou "plus tard", on préfère forcément retarder l'échéance.
A ceci près que lorsque la suite est tellement évidente, qu'elle est non seulement promise, mais qu'elle sera tenue, et qu'il n'y aurait qu'un tremblement de terre qui me permettrait d'y échapper (et encore...), le délai devient comme l'entrée dans un tunnel d'angoisse, dans une période où les pensées ne peuvent que se focaliser sur ce qui "m'attend", sur ce que j'imagine...
Montée dans ma chambre, ayant bien refermé la porte derrière moi, j'étais au bord des larmes, n'ayant guère la tête à faire mes devoirs, même s'il allait bien falloir les faire, car ce n'était pas un jour à s'attirer d'autres reproches...
J'allais et venais entre mes quatre murs, ressentant parfois comme des frissons, des tremblements sous ma jupe, sorte de réflexes d'une lune qui aurait peur de l'orage imminent...
Rentrée une petite heure plus tard, ayant été autorisée à jouer chez une voisine, Diane retrouva Aline dans la chambre voisine, et je guettai ce que mes soeurs allaient se dire, ne doutant pas que mon cas serait évoqué en priorité...
Maman ayant dit à Diane de monter et de rester calme, d'un ton qui signifiait qu'il valait mieux obéir, la cadette de mes soeurs interrogea d'entrée Aline, qui ne se fit pas prier pour expliquer l'humeur maternelle : "C'est à cause de Christine. Elle a eu une très mauvaise note, et Maman l'a envoyée dans sa chambre."
L'oreille collée contre la porte mitoyenne, j'entendais tout. Diane commenta : "Ca va barder alors..."
Aline confirma : "Oui, Maman a dit qu'elle allait lui donner la fessée".
Je n'avais pas entendu Maman prononcer le mot "fessée", mais Aline assurait la traduction simultanée du "Tu sais ce qui t'attend"... Elle n'avait pas tort, évidemment, mais d'entendre mes soeurs appeler un chat un chat, et ma prochaine fessée une "fessée" ne faisait qu'accroitre mon malaise...
Je me forçai à faire mes quelques devoirs. Heureusement, je n'en avais pas beaucoup, car ma concentration n'était pas optimale, loin de là...
Profitant du fait que son petit monde était bien calme en ce début de soirée, Maman me laissa à nouveau mijoter jusqu'au dîner.
Elle nous appela à table, et l'on aurait dit la maison de la famille modèle, les trois filles se montrant sages comme des images. Seule différence : j'étais plutôt taciturne, muette et le regard fuyant, le nez plongé vers mon assiette, cherchant à éviter tout sujet de discussion qui aurait pu ramener à ma situation. Alors que les petites donnaient une image de gamines modèles, mais avec un air radieux et enjoué à l'opposé du mien.
Aline, à la fin du repas, se proposa même pour débarrasser la table, comme si elle voulait que Maman ait fini au plus vite et puisse s'occuper de grande soeur... Ce n'était pas exprimé ainsi, mais je l'interprétais aisément dans ce sens.
Mais, Maman nous expédia vers nos chambres. Et comme ce n'était pas un soir de douches, les consignes furent plus simples. "Allez, montez vous mettre en pyjama. Vous vous débarbouillez et vous brossez les dents. Mais, pas de chamaillerie, ni d'eau partout. C'est l'une après l'autre dans la salle de bain. Ce n'est pas le moment de vous distinguer, si vous voyez ce que je veux dire..."
Et, sûr que dans les trois têtes des filles Spaak, il y avait l'image de Christine sur les genoux maternels, et nul ne voulait prendre sa place, ni moi mériter davantage que ce qui m'attendait...
Aline se précipta la première pour se passer le gant de toilette sur la frimousse et se brosser les dents. En moins de trois minutes, c'était expédié, pour une fois. Elle appela Diane, en lui disant que c'était son tour, et la petite ne traina pas non plus.
A nouveau Aline, qui était décidément pressée... joua les messagères : "Christine, Christine, tu peux aller dans la salle de bains, la place est libre..."
Dans ma chambre, je m'étais mise en pyjama, consciente que cela allait être ma tenue de fessée, et je me sentais plus que mal à l'aise.
J'attendis deux minutes, mais Aline revint à la charge en lançant d'une voix que Maman devait entendre : "Christine, tu sais, tu peux aller faire ta toilette, on a fini..."
Je me décidai donc à me diriger vers la salle de bains, ne réussissant pas à éviter Aline qui était toujours plantée dans le couloir, et qui me vit passer en pyjama. Un détail certes, mais j'aurais préféré qu'elle garde de moi l'image de Christine habillée comme au retour du collège. J'avais l'impression dans mon pyjama d'être vulnérable, fragile, et comme je viens de le dire, je me sentais moins en tenue de nuit qu'en tenue de fessée...
Aline était encore là quand je suis ressortie de la salle de bains, et son regard dans mon dos me semblait imaginer ma lune déjà découverte...
"Maman, tu peux monter, on a fini la toilette", lança encore Aline, elle qui, la veille au soir, était bien moins pressée de voir Maman monter...
"J'arrive, les filles, j'arrive", répliqua-t-elle depuis le bas, et mon pouls se mit à battre la chamade... Surtout quand j'entendis son pas dans l'escalier...
Maman n'avait fait aucune allusion quand j'étais montée après le dîner, je n'imaginais pas pour autant qu'elle ait pu changer d'avis.
En passant devant ma chambre, elle en ouvrit la porte que j'avais bien refermée. Elle me découvrit assise sur mon lit, la tête basse. "J'espère que ton cartable est prêt pour demain. Sors-moi la copie de l'interro que je la signe. J'éteins aux petites et j'arrive..."
Ayant déjà fait mon cartable et la copie étant sur mon petit bureau, je n'avais pas à faire autre chose qu'attendre Maman. Pour une fois, elle ne s'éternisa pas à border mes soeurs. Diane joua les fayotes en lui rappelant qu'elle avait été sage, qu'elle était rentrée à l'heure dite de chez sa copine, et demandant si elle pourrait y retourner le lendemain soir juste pour une heure.
Maman rétorqua que l'on verrait bien et que "demain est un autre jour", glissant au passage qu'elle espérait que ce ne serait pas son tour à elle (Diane) de se distinguer...
Aline dût ne pas apprécier cette périphrase qui rappelait de fait qu'elle avait été punie la veille... Maman embrassa Diane, et dit bonne nuit à Aline également, ajoutant : "Allez, dormez bien. Votre grande soeur m'attend..."
Tiens, j'étais la "grande soeur". Le terme en imposait, mais j'aurais préféré qu'il ne soit pas employé dans un tel contexte. Car la "grande soeur" elle attendait Maman certes, mais elle attendait surtout la fessée, sa fessée...
Maman aurait dit : "Christine s'étant encore comportée comme une gamine, je vais aller la traiter comme telle", je l'aurais presque mieux pris. Là, c'était dire : "Grande soeur attend une fessée de grande soeur..."
En fait, je chipote sûrement. C'est juste que quoi que Maman ait pu dire, cela m'aurait également fait frissonner...
Maman éteint dans la chambre de mes soeurs et vint dans la mienne, refermant la porte derrière elle, mais juste en la tirant.
Elle se dirigea vers mon bureau, regarda à nouveau la copie en haussant les épaules, ce qui accentua sa colère...
Elle prit un stylo et signa, après avoir écrit quelques mots... Puis, elle me tendit la copie en me demandant de la ranger dans mon cartable.
Je quittai donc ma posture d'assise en tailleur sur mon lit, et allai ranger ladite copie. Maman y avait inscrit : "La note de Christine est en effet inadmissible. Comptez sur moi pour faire en sorte qu'elle travaille cette matière beaucoup mieux. Et s'il y avait le moindre souci, n'hésitez pas à m'en faire part, ou à me demander de passer en discuter."
Le mot de Maman ne m'étonnait pas. C'était son habitude de vouloir être proche des enseignants et de ne pas se laisser endormir par mes versions toujours à l'eau de rose de mon comportement en classe.
Le temps que je lise la feuille et la place dans mon cartable, Maman était assise sur le bord de mon lit et faisait signe de venir auprès d'elle...
Je balbutiai un : "Euh, mais, euh, que, euh, pourquoi, M'man, euh, nooon."
C'était sans espoir, d'ailleurs je n'avais pas pu prononcer la moindre phrase intelligible.
"Christine, tu viens ici. Je ne suis pas d'humeur à palabrer... Tu sais très bien ce qui t'attend... Allez, viens recevoir ta fessée bien méritée...", ordonna-t-elle avec une voix qui semblait tellement déterminée qu'elle agissait comme une télécommande, et m'amena à la droite des genoux maternels...
J'étais comme un pantin, qu'elle fit basculer en travers de ses cuisses. J'esquissai un geste du bras droit pour essayer de retenir mon pantalon de pyjama, mais déjà Maman l'avait glissé à hauteur de mes genoux et elle faisait de même pour ma culotte de coton blanc.
Je me mis à pleurer à chaudes larmes, suppliant : "Oh, non Maman, noooon. Arrête, arrête..."
Elle était en train de me bloquer le bras libre dans le dos et de bien me rééquilibrer en travers de ses cuisses. La cible était parfaitement dégagée et dans la ligne de mire.
"Arrête, arrête ? Mais, je n'ai pas encore commencé, Christine... Et je n'arrêterai que lorsque tu auras reçu la bonne fessée que tu mérites, ma fille... Je vais t'apprendre à te moquer du monde et de tes devoirs... Je t'ai assez prévenue, Christine, et tu vas voir que Maman, elle, tient ses promesses..."
La dextre maternelle se mit à tomber, à tanner ma mappemonde offerte, sans plus aucune protection à sa juste colère.
Je serrais les dents et tentais d'étouffer mes cris, mes pleurs, sachant trop combien ces bruits caractéristiques résonnaient dans une maison totalement silencieuse où deux paires d'oreilles étaient aux aguets...
Maman s'appliquait assurément et se voulait démonstratrice, alternant les séries de claques sonores et les commentaires sur les raisons de sa sévérité, sur ce qu'elle m'avait promis et sur ce qui m'attendait et m'attendrait si je ne changeais pas d'attitude...
Petit à petit, je ne pouvais plus retenir mes gémissements, puis mes petits cris, puis mes supplications.
J'aurais voulu taire ma douleur, faire croire aux petites que je prenais une fessée minuscule, que je n'avais même pas mal. Mais, l'art maternel venait à bout de mes espoirs de cacher la réalité de ma fessée.
"Ah, voilà des fesses bien rouges, Christine. J'espère que tu auras compris cette fois, mais sinon je recommencerai ma fille, tu le sais bien... Ne t'avise pas de me ramener à nouveau une aussi mauvaise note, ou deux heures de colle, ou de me mentir sur je ne sais quoi, car tu te retrouveras sur mes genoux, Christine. Comme ce soir, ma grande, la culotte baissée, les fesses à l'air, et je te les rougirai autant qu'il le faudra. Une bonne fessée, une tannée déculottée, tu n'y échapperas pas, Christine... Et, tiens, tiens, tiens, écoute comme ça claque... A toi de décider si c'est cela que tu veux encore..."
La dernière salve fut très longue et énergique, sonore en diable, et me faisant pousser des cris, et tortiller ma lune en feu.
Maman me laissa pantelante, le visage inondé de larmes, et les idées noires comme la nuit. Mais, j'étais aussi étrangement calmée, épuisée, voire comme soulagée que cela soit fini. Même si les mots de Maman me tournaient dans la tête et si mon instinct me disait que cette fessée n'était qu'une de celles qui m'attendaient...
A SUIVRE