samedi 6 mai 2017

Chronique d'un redoublement : 114. De Corinne qui s'y met aussi à Maman qui justifie sa méthode

SUITE 113

Après les moqueries des deux pestes, je réussis à cacher mes larmes qui m'étaient montées aux yeux, puis à reprendre une respiration calme, avant de rentrer à la maison.
Par chance, comme nous étions vendredi, Maman n'avait pas à tout vérifier pour le lendemain, et je pus échapper au questionnaire maternel voulant tout savoir de notre journée, des résultats, des devoirs à faire, etc...
Et puis, en ce vendredi soir, c'était la dernière répétition du gala de danse des petites, et elle avait lieu de 18 à 20 h 30, cette fois, en rassemblant les différents cours pour répéter notamment le final.
Ce qui fait que nous dinerions donc après la répétition.
Peu avant 18 h, Maman me demanda d'aller amener mes soeurs à la salle du gala. Je n'en avais guère envie, mais je compris que je n'avais pas le choix, et accompagnai donc Aline et Diane.
En arrivant, nous tombâmes sur Corinne qui amenait Charline. Les fillettes étaient juste à l'heure et filèrent aux vestiaires retrouver chacune leur cours. Corinne me demanda si je revenais les chercher, je répondis que non, puisque ce serait sûrement Maman. Corinne dit que c'était "dommage", parce que l'on aurait pu discuter...


En arrivant à la salle du cours de danse, nous tombâmes
sur Corinne qui avait visiblement "envie de discuter"
de sujets me concernant... 

Mais, moi bien sûr, je n'en avais pas envie du tout. Nous repartîmes tout de même ensemble vers nos maisons, ayant la moitié du chemin environ qui était commun.
Corinne en profita à nouveau pour tenter d'obtenir des confidences. Elle revint sur le dialogue à la maison quand elle avait ramené Diane, et où Maman ne lui avait pas caché que ma dernière colle m'avait valu une chaude réception. "Tu aurais pu me dire ce qui t'était arrivée au lieu de me le cacher. Je sais bien que ta Maman est sévère, comme quand on était dans la même classe l'an dernier. Tu sais, si tu as encore des colles ou des zéros, je me doute bien qu'elle continue à te donner la fessée..."
Je ne pouvais nier totalement, en raison des confidences de Maman, et je rétorquai par un aveu sous forme minimaliste : "C'est vrai, mais c'est, euh, c'est pas souvent, tu sais".
Corinne joua la compatissante : "Je te plains, ma pauvre, c'est pas drôle de se faire déculotter par une Maman en colère". Et d'ajouter : "Surtout quand le pas souvent, c'est trois fessées dans la même journée, comme samedi dernier..."
J'avais la preuve que Diane avait sûrement raconté à sa manière mes mésaventures à Charline, voire directement à Corinne, qui employait la même version que Babette et Brigitte...
Toujours aussi impulsive quand je devais répondre à ce genre de moqueries, je débitai la même dénégation qu'aux deux pestes : "C'est pas vrai, c'est pas vrai. J'en ai pas eu trois. J'ai eu que deux fessées, que deux... Je te le jure, si, que deux !"
Corinne afficha un petit sourire satisfait : "Je te crois, Christine... Tu vois que tu peux dire la vérité. En tout cas, je n'aurais pas voulu être à ta place... Deux grosses fessées, ça a dû drôlement te chauffer les fesses... J'espère pour toi que tu n'en as pas pris d'autres depuis samedi..."
Là encore, je me défendis en répondant du tac au tac : "Ah, non, ça non, je n'ai pas eu d'autres fessées depuis samedi dernier. Et, en plus, je vais sûrement avoir une super bonne note en anglais".
C'était en effet un peu puéril comme défense, et Corinne répliqua : "Ca change de l'année dernière, quand tu ramenais des zéros à la maison, tu te rappelles, hein ?"


Trop impulsive, voulant me justifier, j'avais avoué à Corinne
que j'avais bien reçu deux fessées samedi dernier.
Corinne, elle, jouant sur de la compassion (feinte),
cherchait à me faire reparler de ce qui m'arrivait
quand je ramenais des zéros ou des heures de colle... 

Par chance, nous étions arrivées où nos chemins se séparaient, et je laissai Corinne à ses souvenirs qui, en la matière, étaient surtout les miens...
Mais, intérieurement, je bouillais et j'enrageais de savoir que mes fessées faisaient ainsi le tour du quartier, et du collège naturellement.
De retour à la maison, Maman m'apprit que Brigitte était venue demander si je n'avais pas emprunté par erreur son carnet de correspondance. Maman avait cherché et fouillé dans mon cartable et vérifié que non. Heureusement que je n'avais pas de mauvaise note ou de mot à faire signer dans le cartable... Brigitte était donc repartie en disant qu'elle espérait retrouver son carnet, car elle ne voulait pas être "encore collée". Maman ayant dit : "Je l'espère pour toi, comme pour Christine", Brigitte avait répliqué : "C'est vrai que ça barderait pour elle à la maison. Comme la dernière fois, je crois ?"
Maman avait acquiescé, en disant : "Oh, ça c'est sûr", tout en faisant un geste caractéristique de la main droite, paume ouverte, mais elle n'en dit pas plus, trouvant la camarade de classe de sa fille bien curieuse...
Quand Maman me raconta ça, je ne fus pas dupe, je compris que c'était une manoeuvre de Brigitte pour venir à la source se moquer de moi ou quémander d'autres informations à mon encontre... Cela ne m'étonnait guère, mais cela commençait à me miner profondément.
Alors, prenant sur moi, je profitai que nous étions seules toutes les deux pour tenter d'aborder le sujet avec Maman. Je tournai autour du pot, mais finis par lui avouer que Brigitte et Babette "se moquaient de moi".   Puis, comme je ne précisais pas comment, Maman comprit en repensant aux questions de Brigitte et me demanda : "C'est parce que je te donne la fessée ?"


 J'avais envie de me confier, seule à seule avec Maman,
mais je tournais autour du pot... Elle comprit que les moqueries
que je subissais avaient trait aux fessées qu'elle me donnait... 

Je baissai la tête, murmurant : "Bah, oui, elles en rigolent..." alors qu'un gros sanglot me remontait dans la gorge. Maman vint vers moi : "Garde donc tes larmes pour quand tu en as besoin. Je comprends que ce ne soit pas drôle, mais si tu travaillais bien, si tu étais attentive en classe, Maman ne serait plus obligée de te punir, Christine".
Je plaidai : "Mais, je suis grande maintenant. Je peux comprendre."
Maman répliqua : "Grande, Christine, en taille peut-être, mais si tu l'étais vraiment, tu te comporterais mieux au collège... Et tu sais bien que Maman est juste, et qu'elle ne te donne la fessée que quand tu l'as méritée. Cela ne m'amuse pas, je préférerais avoir à te récompenser que de devoir te rougir les fesses".


Maman m'expliqua calmement qu'elle préférerait ne plus avoir
à me donner la fessée... Qu'elle ne sévissait que lorsque je le méritais...
Et que c'était à moi de m'assagir, de mieux travailler, sinon je n'aurais
qu'à préparer mes fesses... 

Je me mis à pleurer doucement, et Maman me serra dans ses bras, poursuivant d'une voix toute douce : "Ma pauvre chérie, je comprends que ce ne soit pas drôle, mais crois-moi, il y a encore bien des filles de ta classe qui sont punies comme toi. Mais, c'est vrai que personne ne s'en vante... De toute manière, je n'ai presque rien dit à ta camarade... Cela ne regarde que toi et moi d'abord, mais je ne changerai pas, Christine, et je sévirai tant qu'il le faudra... Tu as compris ?"
Je retins un gros sanglot, et je balbutiai : "Oui, Maman, oui, je sais. Je vais bien travailler et être sage pour ne plus être punie..."
Maman commenta : "C'est tout ce que j'espère, ma grande. Je serai contente et, en plus, tes copines ne pourront plus se moquer de toi". Mais, elle avertit quand même : "Mais, encore faudra-t-il tenir tes promesses, Christine... Tu sais, Maman ne dit pas de paroles en l'air, elle... Mieux vaut ne plus me ramener de zéros, de mots à signer, ou d'heures de colle, ma grande, tu sais bien pourquoi... Sinon, sinon... tu sais ce qui t'attend..."  Et Maman de me tapoter le bas du dos sur mon fond de robe... 
Je me serrai très fort contre elle, et ne pus que murmurer : "Oui, Maman, je sais, je sais..." Elle me déposa un baiser sur le front. Bouleversée, je quittai ses bras et partis dans ma chambre... Je m'affalai sur mon lit, le cerveau bouillonnant. Je ne savais pas quoi penser, tout cela tournait dans ma tête... La logique maternelle était implacable... Expliquée ainsi j'en arrivais presque à me dire que je n'avais en effet que ce que je méritais... Du moins du côté maison, tout en me demandant comment échapper aux moqueries qui, elles, étaient comme une double peine que j'aurais voulu éviter...




Affalée sur mon lit, j'avais mille pensées qui tournaient dans ma tête...
Je repensais à mes fessées précédentes, je revoyais les moqueries
de mes camarades... Je me repassais les explications maternelles,
et cette logique qui me promettait, sauf à tout changer de mon comportement,
d'autres fessées à venir, et peut-être d'autres moqueries... 

Au bout d'une heure, Maman m'appela. Je descendis la retrouver dans la cuisine. Elle avait préparé le dîner et une soupe aux légumes qu'il n'y aurait pu qu'à réchauffer quand les petites seraient rentrées. Elle m'annonça que c'est elle qui allait les chercher, et que je n'avais qu'à essuyer la vaisselle qui était sur l'évier et à mettre la table. Plutôt que d'attendre, je m'exécutai sur le champ, veillant à bien faire et ne rien casser cette fois...
Maman, qui s'était recoiffée un instant avant de partir à la salle de danse, vit la table déjà mise, sans le moindre oubli, ni vaisselle cassée, et me complimenta à sa manière... "C'est bien ma chérie. Tu vois que quand tu veux, tu peux... Maman te félicite... En tout cas, je constate que tu n'as pas oublié ce qui s'est passé quand tu as cassé la pile de verres l'autre soir... Comme quoi une bonne fessée, cela fait réfléchir les maladroites, et cette fois je vois bien que tu fais attention... Pourvu que ça dure..."


Maman remarqua combien j'avais agi dès sa demande, 
et aussi fait très attention de ne rien casser cette fois... 
Cela ne faisait à ses yeux que justifier le bien-fondé de sa méthode...
Il est vrai que, avant même qu'elle ne le dise, j'avais moi-même
été très prudente et attentive, en repensant au samedi précédent
et à la déculottée magistrale que m'avait valu ma maladresse...

Je fis la grimace, de l'intérieur du moins... Que dire à cette remarque maternelle ? Elle était hélas fondée sur des sentiments bien réels... Oui, en mettant la table, sans attendre la dernière minute, et en faisant attention, j'avais eu effectivement en tête l'épisode de samedi dernier, et ces verres fracassés qui m'avaient valu ma deuxième fessée de la journée, et ma troisième déculottée si l'on comptait comme mes soeurs. 
Je ne pouvais nier en mon for intérieur que cette tannée magistrale était bien dans mes pensées en mettant la table précautionneusement, donnant quelque part hélas raison au cheminement de la logique maternelle qui voulait que si une fessée corrige la fautive, elle sert aussi d'avertissement en restant ancrée plus ou moins longtemps dans la mémoire de celle dont on a rougi les fesses...
A SUIVRE