lundi 30 avril 2012

Chronique d'un redoublement : 33. Comment on "gagne" une journée, non sans émotions...

SUITE 32

La nuit avait été plutôt paisible, finalement. Sans trop de cauchemars, ou alors vite oubliés de par une sensation de satisfaction secrète.
Je ne pouvais pas m'enlever de la tête que j'étais dans une position délicate, qu'il faudrait s'expliquer sur cette nouvelle colle, faire signer mon cahier de corrspondance, et en subir certainement les conséquences douloureuses pour mon bas du dos... Mais, le fait d'avoir écouté la petite voix, d'avoir préféré ne rien dire et gagner du temps, m'avait apporté des "satisfactions" personnelles que je retrouvais avec une sorte de joie intérieure.
J'avais pu passer une soirée où Maman m'avait témoigné sa confiance, m'avait traitée en grande, s'était montrée chaleureuse et aimante, au lieu de m'être retrouvée punie, fessée, assignée dans ma chambre, et citée comme l'exemple à ne pas suivre.
J'imaginais aussi que la découverte de mon indiscipline à la veille d'un week-end à rallonge aurait aussi sérieusement pourri l'ambiance, amenant Maman à me faire payer la note sur le champ, mais sûrement aussi à en multiplier les rappels, à m'exclure des activités prévues, etc.
Je me réveillai donc le samedi matin, avec tout cela en tête, réfléchissant pendant que nous profitions d'une grasse matinée, et en arrivant à la conclusion que rien ne pressait...
A moi de trouver le meilleur créneau pour vider mon sac, mais comme je ne l'avais pas fait la veille au soir, je sentais bien que je n'avais guère à gagner à me précipiter... Avouer, cela aurait été comme marcher de mon plein gré vers les genoux maternels, la perspective n'avait rien d'enchanteresse, chacun le comprendra aisément...



Jouer les innocentes, chercher à gagner du temps, essayer de choisir le moment adéquat était plus tentant.
A l'heure de se lever, je ne voyais aucune raison de déclencher l'orage avant terme...
Ces quatre jours s'annonçaient d'ailleurs calmes. Le temps incertain de novembre n'était pas propice aux projets trop précis. Maman le confirma lors du petit-déjeuner. Il y avait des courses à faire samedi après-midi, le dimanche, Tata Jacqueline viendrait déjeuner et on irait faire une balade en forêt s'il faisait beau, lundi, les petites avaient un goûter d'anniversaire chez une de leurs camarades de danse, et mardi étant férié, rien n'était prévu. "On fera peut-être un repas de crêpes, si vous êtes sages", avait simplement précisé Maman. Non sans préciser qu'il faudrait aussi prévoir de faire les devoirs, en particulier lundi.
Les différentes étapes de ce pont étaient fixées, et donnaient un emploi du temps comme sur des rails. Restait pour moi qu'il manquait un rendez-vous non encore programmé, mais que je savais inéluctable : la fessée de Christine ! Heureusement, Maman ne le savait pas encore...
Quitte à me faire reprocher de ne pas avoir parlé de ma colle dès vendredi soir, je ne voyais pas d'intérêt à aller plus vite que la musique...
Surtout que, comme Maman avait parlé de devoirs à faire lundi, l'espoir de gagner encore deux jours, de profiter du week-end en gardant les fesses au frais a vite convaincu ma petite voix tentatrice, et moi-même évidemment...
Il fallait juste éviter les conflits, imaginer que Maman n'irait pas vérifier mes affaires d'école avant lundi, ni ne ferait de rencontres fortuites de ma prof d'ici là. Mais, c'était un risque à prendre, alors qu'avouer ne laissait aucune chance de clémence...
C'est ainsi que je tâchai de marquer des points en me montrant gentille et serviable tout au long de la journée.
L'après-midi, je ne rechignai pas pour aller au supermarché avec Maman et les petites, et je ne réclamai rien, contrairement à Aline, qui fit un caprice, voulant que Maman lui achète un jeu semblable à celui qu'elle et Diane allaient offrir lundi à leur copine lors du goûter d'anniversaire.
Cela valut à ma petite soeur une promesse d'explication au retour à la maison, dont elle ne fit guère de cas, se montrant à nouveau grognonne dans la voiture, puis se chamaillant avec Diane après le dîner, alors que nous attendions le début d'une émission que nous devions regarder en famille à la télévision.
Maman, qui avait été fort patiente jusque là, décréta qu'Aline serait privée de télévision et qu'elle allait la mettre au lit. Elle empoigna ma soeur par le bras en disant : "Ca suffit, Aline. J'avais promis de te calmer après tes caprices au centre comercial. Puisque tu insistes, je sais ce qu'il me reste à faire..."

Et, en les voyant se diriger vers la chambre des petites, tout le monde avait compris ce qui attendait Aline...


Le bruit d'une fessée rapide, mais efficace résonna jusque dans le salon, avant que soeurette ne soit mise au lit, et que Maman ne revienne au salon avec un air très déterminé qui semblait vouloir dire : "Vous voyez que je tiens mes promesses. Voilà une bonne chose de faite, une capricieuse de calmée, mais ce n'est pas le moment de m'embêter, vous savez... Sinon..."

L'épisode m'avait à la fois troublée et rassurée. Troublée parce que Maman venait de donner une fessée pour une question d'indiscipline de ma soeur, tenant une promesse faite dans le magasin, et sans discussion possible... Et, moi, je savais et cachais depuis la veille un acte d'indiscipline que Maman jugerait à l'évidence pire que les caprices de soeurette, et je ne pouvais oublier que, lors de la première colle de l'année, promesse m'avait été faite, d'une déculottée magistrale si je recommençais... Les quelques claques reçues par ma soeur résonnaient dans ma tête comme un avertissement, une sorte de bande-annonce d'un prochain épisode dont je serais, cette fois, la vedette...
Mais, la têtue que j'étais, avait été aussi comme "rassurée" du fait qu'Aline venait en quelque sorte de prendre ma place dans la file. Depuis la veille au soir, je savais que les genoux maternels m'attendaient. Aline venait de me griller la priorité et je n'en étais que plus satisfaite d'avoir déjà gagné une journée complète.
Après l'émission télé, Diane et moi filâmes au lit, et comme la veille, j'appréciai le câlin maternel, ponctué d'un "Bonne nuit, ma grande !" qui fit grand plaisir à celle qui savait combien une prochaine fessée allait la remettre à sa place de gamine indisciplinée... 

A SUIVRE

mercredi 18 avril 2012

Chronique d'un redoublement : 32. Quand l'aveu se fait attendre...

SUITE 31

Que faire ? Il était midi cinq, il fallait rentrer déjeuner à la maison. Je me sentais bouleversée, et je n'arrivais pas à remettre mes idées en place, à trouver des arguments pour présenter au mieux ce qui venait de m'arriver.
Je me suis assise un instant dans la cour, angoissée, paralysée. Comment lui dire ? me demandai-je. Sans réponse, il restait le conseil de la petite voix : "Ne t'affole pas, Christine, gagne un peu de temps. Tu sais bien qu'à midi, c'est un peu la course à la maison. Attends-ce soir pour en parler..."
C'était plus pratique en effet... Je sortis le carnet de correspondance et le laissai dans le casier avec les livres dont je n'avais pas besoin, et je repartis vers la maison. Pas très rassurée, en me demandant si j'allais pouvoir cacher mon trouble, comme je savais le faire plutôt bien l'année précédente.


J'étais en retard d'une dizaine de minutes en arrivant à la maison. En chemin, la voix sérieuse avait repris le dessus, et j'étais quasiment décidée à dire une partie de la vérité, à avouer que j'avais été punie en anglais, mais en donnant une version édulcorée, histoire de préparer le terrain, et de ne montrer le carnet de correspondance que le soir-même...
En fait, ça tournait dans ma tête, et j'étais vraiment hésitante.
Entrant à la maison, Maman et mes soeurs n'attendaient que moi pour passer à table. Elles étaient toutes les trois au salon, et cela me bloqua. Mieux valait un moment calme pour m'expliquer en tête à tête...


"Tu n'es pas en avance, Christine. Allez, on passe à table", lança Maman, sans me demander la raison, et je pus donc d'autant mieux cacher la nervosité qui m'étreignait...
Dès le déjeuner fini, je filai dans ma chambre, passer la petite demi-heure qui restait avant que je doive repartir. Je fis semblant de travailler à réviser mes leçons, et j'évitai les interrogations maternelles.
J'étais finalement assez heureuse d'avoir gagné quelques heures, et l'après-midi étant consacrée à deux heures de sport et une heure de dessin, je tentai de ne plus trop penser à ce qui m'attendait...
L'angoisse repartir de plus belle quand je dus retourner à la maison à la fin des cours...
A nouveau, ma petite tête bourdonnait, une partie cherchant les mots que j'allais employer pour avouer mon acte d'indiscipline, l'autre me disant que j'avais déjà gagné du temps à midi, et que rien ne pressait. Surtout à l'aube d'un week-end de quatre jours...



En même temps, j'avais envie de soulager ma conscience, j'aurais voulu que tout cela soit à conjuguer au passé, déjà... Sauf que cela signifiait, et il n'y avait pas le moindre doute, que j'allais prendre une fessée magistrale... Et, cette perspective a de quoi modérer les ardeurs d'une demoiselle qui aimerait être franche, mais en devine les conséquences...

Si à midi, j'étais arrivée après mes soeurs, ce soir-là, j'étais la première à la maison, même si je me doutais qu'elles ne tarderaient plus.
Demeurait toutefois un créneau de quelques minutes où j'étais seule avec Maman. La petite voix de la franchise me poussa à en profiter. J'allai donc poser mes affaires dans ma chambre et me dis que je devais aller tout dire sur le champ.
Je descendis et rejoins Maman qui était assise sur le canapé du salon. Je restai dans l'entrebaillement de la porte, hésitant encore. Elle leva la tête et dit : "Ton goûter est dans la cuisine, ma chérie."
Je restai immobile un instant, avec les premiers mots de l'aveu sur le bout des lèvres, mais rien ne sortit. Maman releva à nouveau la tête et demanda : "Tu ne vas pas goûter, Christine ? Tu as quelque chose à me dire ?"
Je balbutiai : "Euh, oui, euh..." Cela allait sortir, mais je me ravisai et je m'entendis dire : "Euh, oui, euh, oui, oui je vais goûter", tout en tournant déjà les talons.



La tempête reprit dans mon crâne, et je m'en voulais d'avoir hésité. Mais, une image m'avait bloquée. Quand elle avait relevé la tête, j'avais baissé la mienne, prête à l'aveu, mais mon regard s'était fixé sur les genoux maternels qui semblaient me dire : "Je t'attends", sur la main droite de Maman posée sur le canapé et que j'imaginais déjà me rougissant le bas du dos...
Je ne pouvais me faire à cette idée qu'il "fallait" que j'avoue ma faute, et qu'en même temps cela m'entrainerait sans coup férir justement là, précisément, sur ses genoux...

Cinq minutes plus tard, les petites arrivaient. Le soir, Maman allait les accompagner à une répétition de leur spectacle de danse. Le week-end allait être long, il n'y avait donc pas d'urgence à faire les devoirs. Et, même si elle avait certainement senti mon malaise, Maman n'y revint pas.





On put donc dîner tranquillement, l'ambiance étant plutôt détendue, et comme elle s'absentait avec les petites durant une heure et demie après le repas, Maman me laissa seule, "comme une grande". Avec simplement le numéro de téléphone de Tata Jacqueline, en cas de problème, et en ayant prévenu la voisine d'en face pour qu'elle ne s'étonne pas.

J'en profitai pour regarder la télévision et tenter de penser à autre chose. La consigne était que je me mette au lit à dix heures du soir. Ce que je fis, à un quart d'heure près, tenant à montrer l'image d'une fille obéissante et à qui on peut faire confiance...



Maman était satisfaite. Elle coucha les filles, et vint me dire "bonne nuit". Un moment de douceur que j'appréciais. J'hésitai un instant à me confier en profitant de cette ambiance apaisée, mais je n'en fis rien, laissant Maman me faire deux grosses bises et m'étreindre avant de me laisser dormir.


Quand elle repartit de ma chambre, elle éleva la voix contre mes soeurs qui étaient très excitées par leur soirée, et Maman dut menacer de s'occuper de leurs fesses pour obtenir le calme.
Finalement, cette journée qui avait été marquée par l'épisode de mon inconduite en anglais, s'achevait dans le calme.
J'avais moitié conscience que ce n'était pas bien d'avoir caché la vérité. Mais, du moins, venais-je de passer une soirée paisible...
J'avais été traitée comme une grande, profité de la télévision toute seule, et Maman venait de câliner son ainée pour qu'elle dorme bien.
"Allez, demain, il fera jour", susurrait la petite voix tentatrice. C'est déjà un peu de tranquillité de gagné...
Et, c'est vrai, qu'en pensant à ce carnet de correspondance que j'avais au fond de mon cartable, cette soirée calme était inespérée...
Sûr que si j'avais avoué, j'aurais été privée de télé, mais s'il n'y avait eu que cela... Sûr que Maman se serait fâchée. Aurait-elle agi avant le dîner comme l'autre fois, après le repas, pendant que mes soeurs se préparaient, ou au retour de la répétition ?





Je n'avais pas envie de savoir, mais les hypothèses tournaient, et je n'arrivais pas à empêcher mon imagination de travailler. En tentant de trouver le sommeil, chacune me revenait. Je revoyais les genoux de Maman qui m'avaient bloquée dans ma volonté de franchise, je m'y voyais allongée, je m'y voyais déculottée, je m'y voyais les fesses écarlates...
Des images, des sensations troublantes, mais d'un autre côté, j'avais encore le bas du dos épargné, je n'avais pas eu à attendre en tremblant que Maman vienne régler ses comptes. Ce n'est pas Mlle Paule qui avait décidé de mon emploi du temps. J'avais quelque part "gagné" du temps.
Je savais bien qu'il faudrait y passer, que la fessée m'attendait. Mais, c'était comme un secret que je gardais pour moi. C'était mon secret, "ma" fessée, et tout compte fait je ne regrettais pas vraiment que la petite voix tentatrice ait eu le dessus !

A SUIVRE

mardi 17 avril 2012

Chronique d'un redoublement : 31. Un petit geste aux grosses conséquences

SUITE 30

Cette fessée pour la première colle de l'année m'était restée en travers de la gorge, si j'ose dire. Non pas du fait que j'ai récolté une déculottée maison pour mon inconduite en classe, car je n'avais aucun doute là-dessus. Je savais bien qu'en ce début d'année de redoublement, tout ce qui toucherait à l'indiscipline serait puni de la sorte. Maman avait été assez claire sur le sujet, et l'application de la méthode pour les deux premières mauvaises notes ne me laissait aucune illusion sur la réaction maternelle pour un motif qu'elle supportait encore moins que les mauvais résultats.
Avec Maman, on avait parfois le droit à l'erreur sur un devoir mal compris, mais pas question de tolérer chahut ou indiscipline en classe...
Non, cette fessée me laissait un goût amer, du fait que je n'avais rien pu faire pour éviter un timing qui s'était avéré très pénible pour moi.
Oui, bien sûr, le fait d'avouer d'entrée avait diminué mon angoisse, mais cela avait aussi précipité mon rendez-vous avec les genoux maternels...


La fessée reçue avant le dîner, l'avait été certes dans le huis clos de ma chambre, mais le fait de devoir ensuite redescendre, retrouver mes soeurs et la table familiale, moi en chemise de nuit, infantilisée, le visage défait, et cherchant à cacher ma gêne, ma honte, avait été un moment auquel j'aurais tellement donné pour pouvoir y échapper.
Et, en moi, la petite voix tentatrice me répétait : "si tu avais attendu la fin du repas pour parler de ta colle, tu aurais au moins évité cette scène, et le regard de tes soeurs te voyant veiller à ce que la chemise de nuit ne remonte pas, ou leur sourire quand elle voyait que tu gigotais sur ta chaise, imaginant que tes fesses endolories t'empêchaient de t'asseoir confortablement".
J'étais de plus en plus tiraillée entre la prise de conscience que je me devais d'être franche, et le constat que parfois il pouvait y avoir moyen d'arranger les choses, de jouer un peu avec la vérité, ne serait-ce qu'un temps... Et, si j'étais moins portée sur le mensonge cette année, je ne m'en souvenais pas moins que bien des fois, j'avais réussi à gagner du temps sans conséquence funeste, un mensonge n'étant à mon idée réellement un mensonge que si il était découvert...
Un autre élément me faisait aller en ce sens, c'est que le jour de l'arrivée du bulletin de colle, cinq jours après mon aveu, qui m'avait valu cette fessée magistrale d'avant diner, j'avais aussi ramené deux bonnes notes, et j'avais en moi l'idée que si j'avais attendu, peut-être que les bonnes notes auraient compensé une partie de l'effet de la colle, et que Maman aurait peut-être été moins sévère... On peut toujours rêver !


 Il se passa quinze bons jours, sans la moindre alerte. Je ramenai même quelques notes satisfaisantes, et c'est vrai que je commençais à me dire que cette année de redoublement allait être plutôt tranquille, puisque j'avais déjà assimilé une bonne part des leçons.
Restait bien sûr à obtenir des notes en hausse sensible par rapport à l'année précédente, mais la classe n'étant pas d'un niveau exceptionnel, j'étais au dessus de la moyenne sans forcer.
Seul inconvénient de cette relative facilité, je pouvais avoir tendance à m'ennuyer, à bayer aux corneilles, voire à me laisser aller à bavarder ou même chahuter.
Je faisais attention, mais la tentation était forte. Surtout que mon statut de redoublante faisait de moi une fille un peu à part dans la classe. J'avais déjà réussi à me mettre certaines des élèves dans ma poche, en les aidant parfois. J'avais aussi, à l'inverse, deux ou trois filles, que je regardais de haut l'année précédente, et qui avaient envie cette année de me le faire payer.
Les petites bagarres en douce ne manquaient pas, style tirage de cheveux ou croche-pied, mais je veillais à les régler sans me plaindre, ma réputation de chahuteuse de l'année précédente jouant contre moi.


Cela dit, je n'avais pas qu'une "réputation" théorique, je savais aussi amuser la galerie en vrai. Cela devait me jouer un mauvais tour en cours d'anglais, le cours de Mlle Paule, celle qui avait été mon cauchemar l'an passé, et que je retrouvais malheureusement pour une année de plus.
J'avais conscience que je devais faire attention encore plus qu'ailleurs, et j'étais donc plus assidue, travaillant mieux que l'année précédente.
Mlle Paule me notait sans me faire de cadeau, m'ayant à l'oeil. Toutefois j'étais en ce premier trimestre dans le tiers ou quart supérieur de la classe, ce qui m'enchantait, mes souvenirs de Mlle Paule étant jusque là si souvent associées à une série de fessées mémorable.
Ce vendredi-là était veille d'un week-end de quatre jours, en raison du 11 novembre ou de la Toussaint, qui devaient tomber un mardi. Mlle Paule, lors de la dernière heure de cours de la matinée, rendit les copies d'un contrôle. J'étais parmi les meilleures, avec un 13,5 sur 20.
Mais, alors qu'elle félicitait les filles ayant eu entre 13 et 16, elle me donna ma copie, en faisant la fine bouche : "Correct, Christine, mais une redoublante devrait avoir au moins 15 sur des exercices aussi simples".
Ravie quand elle avait énoncé ma note, sa remarque m'avait douchée. Et, comme elle se trouvait à remonter vers le tableau, je lui avais tiré la langue dans son dos, provoquant l'éclat de rire de la moitié de la classe qui pouvait me voir...
Se retournant brusquement, elle se trouva en face d'une classe à moitié hilare, alors que, me sentant prise, je m'étais figée dans un air sérieux qui détonnait totalement. J'aurais ri comme les autres, elle n'aurait rien vu. En tentant de reprendre une attitude normale, je signais mon forfait.
Et, comme, interrogeant la classe, il y eut une bonne âme pour cafarder que Christine avait fait des grimaces, je tombais de haut...
"Christine, vous me donnerez votre cahier de correspondance à la fin du cours. Je vais y mettre un petit mot. Et vous aurez deux heures de colle en prime !", lança-t-elle devant une classe qui fit "Oh" à cette annonce.
A la sonnerie, je restai avec Mlle Paule qui avait son petit air revêche que je lui connaissais bien. Elle ne fit guère de commentaires, mais se lâcha davantage par écrit.
En me tendant le cahier de correspondance, elle me dit : "Bien sûr, Christine, c'est à ramener signé au prochain cours. Votre Maman voulait que je lui donne régulièrement des nouvelles. Je ne suis pas sûre avec ce mot que je lui écrit, que vous réussissiez à la faire rire comme vous avez distrait vos camarades, mais vous n'avez qu'à vous en prendre à vous-même, et je ne doute pas que votre mère saura vous ramener à une meilleure attitude..."



J'ai pris le cahier, et suis sortie tête basse. Il fallait rentrer à la maison pour déjeuner. Arrivée près des casiers où on laissait nos affaires, j'ai ouvert le cahier de correspondance pour lire le mot de Mlle Paule. J'avais le coeur qui battait en lisant : "Christine semble reprendre ses mauvaises habitudes. Elle préfère amuser ses camarades en faisant le clown derrière mon dos que de travailler sérieusement. Je lui donne donc deux heures de colle, en espérant un sursaut rapide et une tenue exemplaire à l'avenir."

 Je relus deux fois le mot de Mlle Paule. J'étais au bord des larmes. Venant d'elle surtout, ce mot serait pris très au sérieux par Maman. Alors que j'étais heureuse de ma note de contrôle, en quelques secondes, je venais de chuter dans les profondeurs du désespoir. Deux semaines et demie après la première colle, cette deuxième, à nouveau pour un motif de discipline, me dirigeait tout droit vers un sort inéluctable. Ce n'était pas simplement un mot d'une prof mécontente, c'était comme un ticket gratuit pour un rendez-vous avec la dextre maternelle, un bon pour une fessée magistrale, ni échangeable, ni remboursable.
Nul ne le savait encore, même si je suppose que Mlle Paule s'en doutait, mais déjà, moi, je n'avais plus que cela en tête. Ces quelques mots me disaient : "Christine, tu peux préparer tes fesses..."
A SUIVRE