lundi 23 février 2015

Chronique d'un redoublement : 82. Du retour angoissé à la perspective d'une fessée devant témoins

SUITE 81

Je n'avais aucune envie de rentrer à la maison, mais je ne pouvais faire autrement. Je savais même qu'un éventuel retard n'aurait fait qu'aggraver mon cas...
Je n'allais pas non plus courir, bien évidemment, vers ce qui m'attendait. J'avançais donc juste un peu plus lentement que d'habitude, comme si je trainais les pieds, comme pour retarder un tant soit peu le retour au bercail, et le fait de me retrouver devant Maman...

Cette situation, hélas, je la connaissais bien, l'ayant vécu les jours d'arrivée d'un bulletin de colle, ou de remise d'un carnet de notes mensuel, ou quand il y avait une copie ou un mot d'un prof à faire signer.

Je l'avais souvent vécue, avec la tête emplie de peur et de questionnements, notamment sur la manière de présenter l'affaire, sur les arguments à employer pour plaider ma cause, implorer le pardon, tout en sachant qu'il faudrait un miracle ou un concours de circonstances pour échapper à ce que j'imaginais déjà...

Cette fois, ce n'était quasiment que l'angoisse qui m'étreignait... Je n'avais même pas à imaginer de plaidoirie, puisque la sentence était tombée depuis la veille au soir et avait été confirmée au matin, puis à midi... Tout ce qui me trottait dans le crane n'était que cette peur de la tannée promise...


Je rentrai à pas lents, la tête remplie d'angoisse,
me remémorant les promesses maternelles.
J'avais envie de me boucher les oreilles, 
mais c'est mon subconscient qui me répétait ses mots...  

Si encore, j'avais eu durant la journée un résultat exceptionnel, une très très bonne note, il me serait resté la possibilité d'une sorte de recours en grâce, de demande de pardon extraordinaire, mais il n'en était rien, et le 11,5 que je ramenais en géographie risquait, si j'en parlais, d'être plutôt considéré comme n'étant pas à la hauteur des attentes maternelles...

Et puis, après quasiment deux mois de sursis, où j'étais la seule des trois filles ayant été totalement épargnée, je me doutais bien que Maman tiendrait ses promesses... Surtout que, j'avais bien senti depuis quelques jours, voire une à deux semaines, que l'embellie ne serait pas éternelle et que j'allais forcément y passer à nouveau...

Seulement, bien sûr, la longueur de cette période d'impunité faisait que je me faisais encore plus un monde de ce qui m'attendait... Et, de la manière dont Maman avait réagi, avait été claire et sans équivoque dès qu'elle avait appris ma colle, je me doutais bien que, pour elle aussi, ce n'était pas tout à fait une fessée comme les autres, comme dans ces périodes où son ainée en récoltait régulièrement. Là, en ce moment hautement crucial du coeur du dernier trimestre, le faux pas qu'elle redoutait de me voir accomplir, et le relâchement qu'elle craignait, sachant trop bien que j'étais coutumière du fait, cela était forcément plus grave à ses yeux que le seul fait d'avoir pris une fois de plus deux heures de colle en anglais...

Je m'arrêtai quelques instants à deux cents mètres de la maison, j'avais le coeur qui battait et l'impression d'être dans un tunnel, sans aucune lumière d'espoir. Les dernières fois où je m'étais arrêtée là, je m'étais endormie le soir même avec des fesses écarlates. Cette fois, je ne voyais pas comment il en serait autrement... Mieux valait encore rentrer que de rester là à broyer du noir...


Je me suis arrêtée quelques courtes minutes,
appuyée contre un mur à 200 m de la maison...
La dernière fois que je m'étais arrêtée là,
déjà une fessée m'attendait...
Les souvenirs qui me remontaient à l'esprit accroissaient mon angoisse...
 
  Mes soeurs, elles, étaient en train de finir de goûter, quand je pénétrai dans la cuisine. Maman jeta un oeil insistant à la pendule, avant de glisser : "Alors, Christine, tu n'étais pas pressée de rentrer à la maison, à ce que je vois... Mais, on peut te comprendre...".
Je ne répondis rien, et me mis à manger mon goûter, lentement, sans appétit, ce qui, là aussi, se "comprend"...

Les petites avaient des devoirs, et Maman leur demanda de s'installer sur la table du salon-salle à manger. Elle les y accompagna pour regarder ce qu'elles avaient à faire. Je terminai ma tartine et mon bol de lait, puis montai sans faire de bruit dans ma chambre.

De retour vers la cuisine, Maman s'en aperçut et m'appela : "Christine, je ne t'ai pas demandé de monter. Viens donc par ici..."
Du palier du haut, je répondis : "Bah, j'ai deux exercices de maths pour demain. Je voulais les faire tout de suite".
Elle répliqua : "Descends-moi donc ton cartable que je vérifie ça..."
Je m'exécutai, me pointant dans le salon, avec mes affaires, et voulant montrer le cahier de textes à Maman, qui m'interrompit : "Non, laisse-moi regarder. Je ne voudrais pas que tu aies caché d'autres mauvaises surprises". Et elle fit une fouille en règle du cartable, regardant les cahiers et le carnet de correspondance, comme quand j'étais une gamine du primaire. Mes soeurs ne perdaient pas une miette de la scène...


Devant mes soeurs qui comprenaient que j'étais dans une mauvaise passe,
Maman fit une fouille en règle de mon cartable...
Elle craignait que j'ai caché d'autres mauvaises surprises... 

Heureusement, il n'y avait pas de "mauvaises surprises", même si, comme je m'en doutais, le 11,5 en géo fut interprété comme une preuve de plus que j'avais tendance à me relâcher...

Maman me rendit mon cartable et m'autorisa à remonter dans ma chambre : "Va donc faire tes exercices de maths, et applique-toi. Tu viendras me les montrer quand tu auras fini. Comme ça, ce sera fait avant qu'on discute toutes les deux... Ou, du moins, que je m'occupe de toi, comme promis..."
Je gémis en murmurant d'un ton plaintif : "Oh, Maman, s'il te plait..."

Elle me coupa net : "Christine, tu sais très bien que tu n'y échapperas pas, alors fais d'abord bien tes devoirs, et arrête de chigner : cela ne sert à rien..."

Je remontai, tête basse, en évitant le regard d'Aine et Diane, qui devait pétiller en douce.
Les deux exercices n'étaient pas durs pour une bonne en maths, qui plus est redoublante, mais je fis très attention, craignant une erreur, perturbée que j'étais par l'évidente détermination maternelle, et aussi par le fait qu'elle n'avait pas dit qu'on "discuterait" plus tard ou "ce soir". Ses mots que je me répétais semblaient vouloir dire qu'elle allait "s'occuper" de moi une fois les devoirs faits...
Vous allez dire que cela ne change pas grand chose, mais quitte à devoir angoisser deux ou trois heures de plus, j'espérais bien ne me retrouver sur ses genoux qu'à l'heure du coucher...


Je m'appliquai particulièrement à faire ces deux exercices de maths,
pas pressée de retrouver Maman,
qui m'attendait pour "s'occuper" de moi... 

Une fois les deux exercices faits, je restai une dizaine de minutes devant mon cahier, préférant attendre les ordres. Maman se douta de quelque chose, lançant du bas de l'escalier : "Tu n'as pas encore fini tes exercices, Christine ?" Je répondis que si, et elle rétorqua : "Eh bien, alors, viens donc me les montrer. Dépêche-toi, on n'a pas que ça à faire..."
J'étais peu fière de moi en la retrouvant dans le salon, lui tendant mon cahier, en m'excusant : "Euh, j'avais pas compris, je croyais que tu allais monter, euh, me voir, euh..."
Elle ne releva pas tout de suite, vérifiant les exercices de maths, qui étaient bons, mais sans m'en faire de compliment, étant sensée ne pas avoir de problème en la matière.

Maman me redonna le cahier et me dit : "Bon, ça va, c'est bon. Maintenant, va donc remettre le cahier dans ton cartable, et redescend moi l'enveloppe du collège avec ton bulletin de colle que j'ai déposée sur ton petit bureau..."

Je fis la grimace, commençant à comprendre ses intentions... Je demandai à mon tour : "Bah, euh, pourquoi ? Tu ne viens pas avec moi, euh ? Tu ne veux pas que, euh, que je t'attende, euh, dans ma chambre ?"

La réponse confirma mes plus grandes peurs : "Christine, tu ne discutes pas. Tu fais ce que Maman te demande, un point c'est tout ! Tu as besoin d'une bonne leçon, et ce n'est pas toi qui décide d'où, quand et comment je vais te la donner. Allez, ouste, va donc chercher la preuve de ton nouvel exploit..."


"Va chercher ton bulletin de colle dans ta chambre et reviens ici" !
Les ordres de Maman étaient clairs et nets.
Ce n'était pas à moi de décider où, quand et comment
elle me donnerait la fessée promise... 

Je remontai, en sanglotant, et trouvai l'enveloppe du collège, qui avait été ouverte à midi, et qui trônait bien sur le petit bureau de ma chambre, où j'imaginais que Maman serait venue m'en "parler" à sa façon...

Je ressortis de la chambre, mais restai bloquée en haut de l'escalier. Je tendis l'oreille, et entendis Maman qui regardait comment mes soeurs faisaient leurs devoirs. Aline avait fait quelques ratures et se prit : "Sois donc plus soignée, Aline, fais attention. Pour toi, comme pour tes soeurs, ce n'est pas le moment de relâcher les efforts. Ne fais pas comme Christine, sinon il t'arrivera la même chose qu'elle, et tu vas voir que Maman ne plaisante pas..."
C'était donc clair : j'allais recevoir ma fessée devant mes soeurs, et c'était pour moi comme une double peine...

Maman mit la tête par la porte du salon, me découvrant figée en haut des marches, sur le palier des chambres. "Bah, tu descends, allez", lança-t-elle. Je suppliai : "Maman, non, je préfère que tu montes".
Elle tonna : "Mademoiselle préfère ce qu'elle veut, moi, je te demande de descendre, et ne m'oblige pas à venir te chercher, sinon tu le regretteras encore plus..."
Je fis un pas, puis un autre, comme une automate, descendant lentement au rez-de-chaussée. Je m'arrêtai à la porte du salon, prenant de grandes respirations, avant d'oser entrer et arriver sous les trois regards qui m'attendaient...

Je tendis l'enveloppe à Maman, puis reculai de trois pas, me retrouvant le dos au mur. J'avais Maman à ma gauche, assise dans le salon, et à ma droite mes soeurs faisant face à Maman, Aline encore attablée devant son devoir, Diane jouant les petites filles modèles en regardant la scène sans broncher...





Diane observait la scène, dans son attitude coutumière,
de petite fille modèle, sage et au sourire retenu,
ne manquant surtout rien de ce qui se passait sous ses yeux... 

Elle me montra l'enveloppe, en disant : "Bon, on ne va pas discuter 107 ans. Qu'est-ce qu'il y a dans cette enveloppe, Christine ?"
Je répondis : "Mais, tu le sais bien, M'man".
Elle haussa le ton : "Christine, tu réponds à mes questions, ou ça va aller vraiment très mal..."
Je retins un sanglot, et dis : "Bah, euh, c'est un bulletin de colle, M'man".
Maman reprit : "En quelle matière, une fois de plus, Christine, et pourquoi cette colle ?"
J'avais les jambes qui tremblaient en répondant : "Bah, c'est en anglais, encore, M'man. C'est Mademoiselle Paule qui l'a donnée. Pour bavardage, M'man".

Le ton de Maman se fit ironique, s'adressant au passage à mes soeurs également : "Oui, c'est bien cela, encore deux heures de colle en anglais. Vous avez bien compris, votre grande soeur n'a rien d'autre à faire qu'à bavarder en classe, et surtout en cours d'anglais, avec une prof qui l'a déjà souvent collée, et qui a été de celles qui ont fait pencher la balance pour que Christine redouble..."
Et, de me demander à moi : "Mais, où as-tu la tête, Christine ? Recommencer à moins bien travailler, te remettre à bavarder au lieu d'écouter, tout cela en plein dans le dernier trimestre, celui qui est le plus important... Et, tu voudrais que je reste les bras croisés ou que j'applaudisse ? Tu cherches franchement les ennuis..."

Je ne savais quoi dire, ayant un peu conscience qu'elle n'avait pas tort... Je tentai : "Mais, je travaille mieux, Maman. Et, je n'ai pas été collée depuis longtemps..."
Argument rejeté bien sûr : "Tu travailles bien quand je suis derrière toi, Christine. Mais, dès que je te laisse du champ, tu en profites. Et si pour toi, c'est longtemps, c'est peut-être parce que tu as oublié ce qui arrivait quand tu étais collée... C'est cela, oui, sûrement, alors je vais te rafraichir la mémoire... Crois-moi, tu vas être servie, ma fille..."

Je protestai : "Mais, non, Maman, je n'ai pas oublié, promis. Je sais bien ce qui arrivait quand j'ai été collée. Là, c'est la dernière fois de l'année. Tu verras, je ne serai plus collée, je ne bavarderai plus, promis de promis, Maman".

Elle reprit la balle au bond : "J'espère bien que ce sera la dernière colle de l'année, Christine. Je l'espère pour toi, parce que sinon tu recevras encore une fessée carabinée, comme celle que je vais te donner maintenant, ma fille..."

J'implorai, éclatant en sanglots : "Non, Maman, non, pas la fessée. Ou pas ici, pas maintenant, nooon !"

Elle me rabroua : "Tais-toi donc, Christine. Je crois au contraire que cela s'impose... D'ailleurs, tu cherches les ennuis depuis quelques jours, et tu as bien de la chance d'y avoir échappé jusque-là... Alors, avec cette colle en prime, je pense qu'une bonne déculottée, là, maintenant, devant tes soeurs, te fera le plus grand bien... Cela t'aidera peut-être à te souvenir plus longtemps qu'il ne faut pas bavarder en classe, et encore moins durant les cours de Mlle Paule... Tu devrais pourtant le savoir, depuis le temps, avec toutes les fessées que cela t'a valu..."




Je détournais le regard, ne pouvant soutenir celui de Maman,
qui étayait un raisonnement sans faille...
Je ne pouvais pas nier que j'étais prévenue,
que je savais qu'une nouvelle colle, surtout en anglais,
me vaudrait une déculottée magistrale...

Ce raisonnement, je le connaissais trop bien. Il était hélas empreint de bon sens, et je ne pouvais, au fond de moi, nier que Maman avait raison, ni évidemment que je savais ce qui m'attendait... Mais, de là à accepter sans broncher une déculottée devant mes soeurs, il y avait un pas. Je me fis suppliante : "Je sais, Maman, je sais. Mais, je te promets vraiment que je ne recommencerai plus. Pardonne moi, ou alors, euh... viens dans ma chambre..."  

J'avais prononcé ces derniers mots avec une toute petite voix, les chuchotant presque...
Maman répliqua : "Dans ta chambre ? Mais, Christine, tu sais bien que ce n'est pas toi qui commande. En plus, si j'ai bonne mémoire, la dernière fois que tu as été collée, c'est dans ta chambre que tu as reçu ta fessée, en me promettant bien de ne jamais recommencer... Et tu as recommencé quand même. Alors, si cela te fait honte de venir sur mes genoux devant tes soeurs, tu n'auras qu'à réfléchir à deux fois avant d'être à nouveau collée... Allez, assez discuté, viens ici, Christine... Et, tout de suite !!!"

Autant, j'avais baissé le ton en finissant ma supplique, autant Maman avait élevé la voix, pour me commander de venir vers elle. Le "Et, tout de suite" était même tonitruant, et m'impressionna. De toute manière, je n'avais plus d'argument, si tant est que j'en ai eu vraiment. Cela faisait hélas des jours que j'avais compris que la trêve ne durerait pas et que mon heure approchait... Cette fois, c'était le moment...


Alors que Maman venait de me demander de venir "Tout de suite !",
je me rappelais qu'effectivement, la dernière fois où j'avais été collée,
c'était bien encore en anglais, et cela m'avait valu une tannée mémorable,
donnée par Maman dans ma chambre...
La scène me revenait comme si c'était hier, mais aujourd'hui,
c'est dans le salon, devant mes soeurs que j'allais montrer mes fesses...


Le ton maternel ne souffrait aucune contestation, et résister n'aurait fait qu'empirer les choses, surtout devant mes soeurs.

Je m'avançai vers Maman, regard baissé, pleurnichant, mais sans même faire le petit pas en arrière, que j'avais tendance à faire au moment où je me retrouvais à portée de main maternelle. Maman se pencha pour m'attraper par le poignet et me fit basculer en travers de ses cuisses, pendant que les seuls mots qui me sortaient de la bouche étaient une succession de petits "Non, non, oh, non" plaintifs.

A SUIVRE

vendredi 13 février 2015

Chronique d'un redoublement : 81. Après l'aveu, la sentence est claire et sans espoir de clémence

SUITE 80

Je me sentais toute bizarre quand Maman a quitté ma chambre, après mon aveu. Je n'arrivais pas à comprendre ce qui m'avait fait basculer, éclater en sanglots pour avouer que j'avais été collée. Dans la petite bataille qui se déroulait dans mon cerveau entre la voix me conseillant de ne rien dire et de gagner du temps, et celle qui me faisait comprendre que ce serait sûrement pire si je continuais à jouer les cachottières et à mentir à Maman, c'est cette dernière, pour une fois, qui l'avait emporté.
Mais, en même temps, Maman avait bien compris que cela faisait déjà 24 heures que je lui cachais cette mauvaise nouvelle, et elle m'avait bien fait comprendre que c'est surtout cela qu'elle retenait, plus que mes regrets et ma franchise tardive...
Bref, mon aveu n'aurait certainement que peu d'influence sur la détermination maternelle de me faire payer mon inconduite et mon mensonge en prime...
Et, Maman avait été plus que claire en mettant les points sur les "i" et en appelant un chat un chat. C'est bien "une fessée", et même "une bonne déculottée" qui me serait donnée le lendemain. Cette fois, elle n'avait pas employé les classiques "on réglera nos comptes", ou "on aura une petite discussion toutes les deux", voire le "tu sais ce qui t'attend" qui reste évocateur sans nommer ladite promesse.

De toute manière, depuis que Mlle Paule avait annoncé que j'aurais deux heures de colle, je ne doutais pas de ce que cela entraînerait. Mais, au moins, était-ce entre moi et moi, en secret.
Là, c'était dit, annoncé, programmé, comme un aller simple, sans retour possible.



Maman, cette fois, avait été très claire... 
Pas de périphrases, ni d'allusions, c'est bien "une fessée", 
et même "une bonne déculottée qui m'attendait,
sans le moindre espoir d'y déroger...
Et déjà, je pouvais me l'imaginer...

Pire, la maisonnée était au courant, car mes soeurs ne dormaient pas encore, et n'avaient pas manqué de tendre l'oreille, lorsqu'elles avaient entendu leur aînée éclater en sanglots et Maman hausser le ton avec des mots et des promesses non équivoques...

J'entendis d'ailleurs encore Aline et Diane chuchoter quand Maman redescendit fermer la maison et se préparer à aller elle-même se coucher.

Mère et filles, chacune allait pouvoir s'endormir en sachant que le lendemain, Christine allait recevoir une fessée magistrale, mettant fin à une longue pause de près de deux mois, et l'on imagine que cela a dû faire travailler quatre cervelles, mais pas de la même façon...

Pour Aline et Diane, il devait être question de se dire que ce ne serait pas le moment d'énerver Maman, pour éviter d'y passer aussi. Mais également, mes soeurs devaient déjà se dire qu'il leur faudrait être aux aguets, rester un maximum à la maison, afin de ne pas manquer ce moment...

Dans la tête de Maman, la situation devait être analysée et ré-analysée, avec un raisonnement qui confirmait ses certitudes et ses principes. Oui, elle savait bien qu'il faudrait surveiller Christine jusqu'au bout, qu'il faudrait réagir dès le premier relâchement, et qu'elle "sentait" bien que son aînée se laissait un peu aller ces derniers temps. Et Maman d'être persuadée qu'il fallait marquer le coup et ôter à sa fille l'envie de gâcher ce dernier trimestre qui était bien engagé, et ce, justement, par une attention forte portée à surveiller Christine. Autant de pensées qui confortaient Maman dans sa volonté de bien tenir ses promesses vis à vis d'une Christine qui savait qu'elle devait préparer ses fesses...

Si Maman allait s'endormir en se disant qu'il allait falloir donner une bonne leçon à son aînée le lendemain, si Aline et Diane imaginaient déjà que leur grande soeur allait être la vedette du jour, pour moi, c'était bien plus dur de trouver le sommeil sans penser à ce qui m'attendait, ni sans cauchemarder en faisant des rêves mêlant des situations connues et des peurs incontrôlables.

Souvent, dans ce genre de situations, je passais une partie de la nuit entre deux réveils en sursaut, entre deux visions anticipatrices, à chercher comment j'allais expliquer ma colle ou ma mauvaise note à Maman. Je me répétais des phrases censées apaiser sa colère, plaider en ma faveur, implorer son pardon, ou du moins sa clémence... Là, la messe était dite, quoi que je dise, la décision était prise, annoncée, et je ne pouvais même plus me bercer d'illusions, en imaginant des circonstances atténuantes, en cherchant à endormir la réaction maternelle. Non, tout ce que je pouvais penser, c'est que j'allais plonger en travers des cuisses maternelles et que l'orage allait tomber sur une lune bien déculottée...

Un de mes rêves sombres de cette nuit agitée dans mon esprit apeuré anticipait ce rendez-vous. Je me voyais à la dernière heure de cours du lendemain, ranger mes affaires dans mon cartable, puis remonter ma jupe dans le dos pour la coincer dans ma ceinture, et baisser ma culotte juste au ras des fesses, avant de quitter le collège ainsi, et traverser la ville la lune à l'air, en rentrant tête basse à la maison. Et, j'entendais mes camarades de classe me demander ce que je faisais, puis les badauds, les voisins et les commerçants du quartier poser la même question, à laquelle je m'entendais répondre, comme si c'était naturel : "Bah, j'ai été collée, alors Maman m'a dit : Prépare tes fesses pour quand tu rentreras à la maison. Alors, comme ça, elles sont prêtes..."




Drôle de cauchemar qui a hanté cette nuit...
Je me voyais rentrer du collège, sac au dos, jupe relevée
et culotte baissée, et répondant aux passants moqueurs :
"Maman m'a demandé de préparer mes fesses...,
je ne voudrais pas la fâcher..."

Mais, comme mes sanglots et mes aveux m'avaient un peu calmée, j'ai finalement dormi quand même.

Au réveil, j'ai vite compris que ce serait une journée pas comme les autres. On sentait déjà à peine levées que mère et filles entraient dans leur rôle. Aline et Diane étaient obéissantes et étrangement calmes, du moins dans leur façon de parler, de se tenir, leurs yeux vifs et leurs mines curieuses témoignant au contraire d'une envie de bien observer ce qui se tramait entre leur grande soeur et leur mère...

Maman, elle, avait un ton plus sec que d'habitude, une intonation qui montre que tout doit filer droit et que ce n'est pas le moment de perturber le déroulement classique d'une journée d'école. Et, personne n'avait envie de tenter le diable, ce qui fait que tout se déroulait sans anicroche.

Il y eut juste une paire d'allusions, notamment quand Maman recommanda aux petites d'être sages à l'école, et "de ne pas faire comme Christine, qui s'est encore distinguée en prenant deux heures de colle". Ce à quoi Diane avait répondu : "Dis, c'est vrai qu'elle va être punie ?", Maman se contentant de rétorquer : "Oui, ça c'est sûr, elle peut préparer ses fesses, mais on verra ça plus tard. Filez donc à l'école, avant qu'il ne soit trop tard".

Puis, Maman retourna dans la cuisine, laissant Aline et Diane se préparer à partir à l'école. Je vis mes deux soeurs chuchoter entre elles, et Diane se tapoter le fond de pantalon, en se retenant de rire de ce geste en forme de mime moqueur...




Mes soeurs avaient entendu la veille au soir mes pleurs 
et les promesses maternelles à mon encontre. 
Maman venait de leur confirmer que je serais punie...
En douce, Diane mima la fessée, faisant rire Aline...

Je retrouvai ma classe, tentant de cacher une mine pas gaie du tout, et je me tins à carreau, jusqu'à intriguer mes voisines, qui comprenaient que quelque chose me tracassait.

En rentrant à midi, je compris au premier regard que le facteur était passé. L'enveloppe du collège trônait sur mon assiette, Maman l'ayant déjà ouverte, et je pus lire que le motif parlait de "bavardage intempestif" et ce, "malgré des avertissements répétés" ! Des mots qui assurément ne plaidaient pas en ma faveur...

J'aurais voulu expliquer que Mlle Paule n'avait fait qu'une seule remarque avant de donner des heures de colle dès la deuxième, mais je ne suis pas sûre que cela aurait adouci la colère maternelle...
J'ai plutôt baissé le nez, connaissant la détermination de Maman, et ne souhaitant pas qu'elle en rajoute dans le rappel de ce qu'elle m'avait promis dès la veille au soir.

De toute manière, la pause du déjeuner était trop courte pour une grande explication, et je pus repartir sans dommage au collège pour l'après-midi. Non sans que Maman, constatant que j'avais encore cours d'anglais en dernière heure, ne me fasse une remarque en forme de recommandation : "Travaille bien, ma grande. Et, tiens toi surtout bien en cours d'anglais. Il ne faudrait pas que tu sois collée à nouveau, alors que tu n'as pas encore reçu la fessée que je vais te donner ce soir..."
Mes yeux s'embuèrent et j'implorai : "Maman, s'il te plaît, non..."
C'était évidemment cause perdue, et elle le confirma, d'un ton très calme : "Voyons, Christine, ne dis pas n'importe quoi. Tu sais que Maman tient toujours ses promesses. Et tu as largement mérité la bonne fessée que tu recevras ce soir. Allez, file donc au collège, ce serait dommage que tu sois en retard. On aura tout le temps de régler nos comptes tout à l'heure".



Le bulletin de colle était bien arrivé, et Maman me recommanda
de bien me tenir cours, me rappelant sa promesse,
et confirmant devant mes soeurs 
qu'elle me donnerait la fessée ce soir...

L'après-midi me vit complétement éteinte, faisant grise mine, et ne répondant guère aux sollicitations de mes camarades, en restant dans mon coin lors de la récréation, prétextant que j'étais patraque.

La dernière heure fut assez pénible, puisque je retrouvais celle qui était à l'origine de mes ennuis... Du moins, est-ce ce que je pensais car, dans ma tête, j'attribuais ces heures de colle à celle qui me les avait donnés, et non à mon bavardage évidemment...

Je me montrai attentive, répondant même par deux fois la première en levant le doigt, très attentive bien sûr à ne pas avoir de nouvelles remarques...
Mlle Paule constata cette transformation positive, qui dut la conforter dans l'idée qu'elle avait bien fait.
D'ailleurs, au moment de quitter la classe, après avoir rangé mes affaires et laissé passer le flot de mes camarades pour être tranquille, je me levai enfin et passai devant le bureau de ma chère (enfin, c'est une image) prof d'anglais, qui me dit : "C'est bien, Christine. Aujourd'hui, vous avez été attentive et calme. Ce serait bien que cela soit plus souvent le cas..."
Je répondis d'un petit air innocent : "Oui, Mademoiselle, je sais".
Elle ajouta : "C'est quand même dommage qu'il ait fallu encore deux heures de colle pour vous faire entendre raison. Je me doute bien, connaissant votre mère, qu'elle n'a pas dû apprécier, n'est-ce pas...? "




Mlle Paule me félicita pour une fois, regrettant qu'il ait "encore" fallu
me donner deux heures de colle pour que je m'assagisse...
Elle me fit comprendre qu'elle se doutait bien que Maman
n'avait pas apprécié et réagi... Je pense qu'elle imaginait même comment...
Moi même, c'est moins les heures de colle que je craignais, que ce qui m'attendait...

Je baissai le regard et ne répondis rien. Je n'allais sûrement pas lui dire quelle avait été la réaction de Maman, et comment cela allait se concrétiser pour une certaine partie de mon anatomie... Mais, je pense que Mlle Paule s'en doutait bien...


Il restait encore à rentrer à la maison. Le retour du collège prenait pour moi les allures d'une marche vers les genoux maternels.  Cette sensation, je la connaissais, bien sûr. Je l'avais ressentie à bien des reprises, mais la vivre après quasiment deux mois sans fessée la rendait plus angoissante, plus palpable... 

De plus, je ne pouvais même pas me réfugier dans le moindre espoir de clémence, je ne pouvais pas chercher les arguments qui m'auraient sauvée. Non, du fait de mon aveu de la veille, immédiatement ponctué par la sentence maternelle, aucun doute n'existait. L'arrivée du bulletin de colle par la Poste, le libellé très clair de la faute qui m'était reprochée, et la confirmation maternelle faite avant que je ne reparte l'après-midi, tout cela faisait que je savais que Maman allait tenir sa promesse. 

Je rentrais donc recevoir "la bonne fessée" que je "méritais", selon elle, et je savais déjà, même si ce n'était pas une surprise, mais là les mots avaient été clairs, que c'est "une déculottée" qu'elle allait me "donner".



Je rentrais à pas lents. Heureusement, pas comme dans mon cauchemar...
Mais, dans ma tête, c'était tout comme, et j'évitais de croiser
le regard des passants. Mes jambes en tremblaient presque,
sachant que c'était comme si, en quelque sorte,
j'amenais mes fesses pour que Maman me les déculotte
pour me donner cette "bonne fessée" promise et, somme toute, méritée !


Difficile alors de rentrer en souriant, en faisant semblant. Je n'avais pas le courage de cacher mon désarroi, et je repensais à mon cauchemar de cette nuit-là... Comme si je traversais la ville, culotte baissée, ayant déjà "préparé mes fesses" !


A SUIVRE