lundi 8 novembre 2010

Mes ruses de Sioux : la malade imaginaire (14)

SUITE 13

Je suis rentrée, tête basse, moitié en pleurs...


Je n'ai pas fait de détour sur le chemin de la maison. J'étais même contente d'être seule, de ne pas être raccompagnée comme souvent par Anne ou une autre copine du quartier. Je me sentais comme dans un tunnel, dans une voie avec une seule issue, la maison où m'attendait Maman.
La spécialiste, la championne du monde du "gagner du temps" que je pouvais être parfois, sentait combien il était inutile de jouer la montre. Maman attendait cette note, la guettait depuis une semaine, mentir le jour où elle était rendue aurait été une folie.
Et puis, ce contrôle, il fallait bien en clore le chapitre. Nous étions lundi soir, cela faisait deux semaines exactement que j'avais commencé à vouloir l'éviter en feignant l'indisposition, avant de réussir, le lendemain matin à faire croire à ma forte fièvre. Du moins le temps d'une matinée, qui s'était achevée en fanfare avec une lune écarlate devant mes soeurs...
Le contrôle reporté, la semaine de privation de sortie, puis à chaque cours d'anglais l'attente d'une note que j'espérais bonne, et le rappel maternel fréquent de ses promesses si je ne tenais pas les miennes.
Maintenant que j'avais eu le temps de me préparer à une désillusion de par les confidences de Mlle Paule, puis que la confirmation m'en était venue le jour dit, celui où Maman savait que les résultats tomberaient, la seule chose à faire était bien de rentrer et d'annoncer la couleur...
Juste devant la porte, j'ai essuyé mes larmes pour tenter de cacher mon désarroi, mais en ouvrant la porte, j'avais la mine déconfite, le regard vers le plancher, et une voix toute timide pour lancer comme d'habitude : "Maman, c'est moi".

"Ce n'est pas possible. Je le savais..."


Elle était dans le salon, près de la bibliothèque, et m'avait répondu d'un usuel : "Je suis là, Christine. Ca va, ma chérie ?"
Mais, arrivée en face d'elle, mon émotion a repris le dessus. Je me suis mise à renifler, à sangloter, en bafouillant : "Bah, euh..."
A voir ma mine, elle avait compris : "Toi, comme je te vois, tu as de mauvaises nouvelles".
Instinctivement, je hochais la tête comme pour dire "Non, non, M'man", mais même ces mots-là ne sortaient pas de ma bouche.
"Allez, ne me mens pas. Tu as enfin eu tes résultats d'anglais, c'est cela, hein ? Alors, tu as eu combien ?" demanda Maman sans me laisser le temps de souffler.
Il fallait que je me soulage, j'ai répondu d'une voix chevrotante : "Bah, euh, sept, Maman... Sept !"
Le visage maternel se figea. Elle resta un instant bouche bée avant de repartir de plus belle : "Ce n'est pas possible, Christine. Je le savais, je le sentais. Et toi qui voulais me faire croire que tu aurais la moyenne. Ca, ma fille, tu vas me le payer... Montre-moi voir donc ta copie !"
Comme soufflée, elle s'était assise sur le canapé, alors que je cherchais mon devoir pour lui montrer.

Je plaidai avec l'énergie du désespoir, pleurant à chaudes larmes.


"Maman, Maman, tu sais, il n'y a que trois élèves qui ont eu la moyenne. Même Anne a en dessous de 10. Et puis, regarde, Mlle Paule a dit que j'avais fait des efforts. Tu n'as qu'à lire, c'est écrit dans l'appréciation". En tendant ma copie à maman, j'avais retrouvé l'énergie pour me défendre, c'était l'énergie du désespoir, celle des causes perdues, mais je lançais mes arguments avec une sincérité poignante, entre deux sanglots d'une crise de larmes qui m'étreignait.
Maman n'était pas convaincue pour autant : "Christine, je me fiche des notes des autres élèves. C'est toi ma fille, toi que j'élève, toi qui m'avais promis d'avoir la moyenne... D'accord, c'est mieux écrit, c'est plus propre, tu as fait plus attention, mais la prof parle aussi de lacunes grossières et dit qu'il est temps que tu te reprennes... Et moi, je sais ce qu'il faut faire pour cela... Et tu n'y échapperas pas, Christine..."
La menace était claire, je savais bien ce que cela voulait dire.
"Maman, non, je t'en prie, pardonne moi. J'ai fait des efforts. J'ai déjà été assez punie l'autre jour pour ça...", essayai-je comme argument supplémentaire. Il fit un flop : "Christine, ce n'est pas toi qui décide ce qui est assez ou pas assez. L'autre jour, comme tu dis, tu as été punie pour avoir essayé d'échapper à ce contrôle. Tu m'as rendue ridicule devant notre médecin de famille et tu as osé jouer la comédie parce que tu ne voulais pas passer ce contrôle. Parce que tu savais que tu aurais une mauvaise note et que tu aurais des problèmes à la maison. Depuis, tu me fais croire que tu auras la moyenne, et tu as même voulu m'amadouer en essayant de placer la barre à 9. Mais, on en est loin, Christine. Ce n'est pas 10, ni 9, ni même 8, c'est un 7 sur 20 pas brillant du tout. Et si tu rentres avec cette tête-là, c'est que tu sais très bien ce que cela veut dire, ma chérie. C'est la fessée, Christine, la fessée, et tu n'y couperas pas !"
J'ai émis comme un petit cri, un "Nooonnn, non, Maman, je serai sage. Nooon, je t'en prie, noooon, pas la fessée...."
Je devais avoir l'air désespérée, même si je venais d'avoir la confirmation de ce dont je ne doutais pas, de ce dont je ne doutais plus...
J'étais là, devant elle, me balançant d'un pied sur l'autre, l'air godiche, apeurée. Je n'osais bouger, ne sachant pas si Maman allait m'empoigner sur le champ, là sur ce canapé, où treize jours plus tôt j'avais été déculottée devant mes soeurs...
Aline et Diane, justement, étaient en train de rentrer. La porte d'entrée venait de claquer. Le scénario catastrophe se faisait jour. Tout allait être réuni pour un remake éclatant...
Mais, l'histoire ne pouvait se répéter à l'identique. Aline, entrant dans le salon, interpella Maman : "Dis M'man, nos affaires de danse sont prêtes ? Tu sais que c'est toi, cette semaine, qui nous amène au cours avec Diane et Elodie. Et que c'est la maman d'Elo qui nous ramènera ?"
Maman n'était pas prise au dépourvu. Elle le savait bien et a envoyé mes soeurs prendre leurs sacs de danse dans leur chambre, avant de s'absenter le temps de les amener à leur cours de danse du lundi soir.
Elle les vit filer vers l'étage et reprit un instant sa conversation avec moi : "Bon, Christine, on reparlera de cela tout à l'heure. Après le dîner..."
Je grimaçai... Après le dîner, c'était la perspective d'une fessée devant mes soeurs. Ou au mieux à portée de leurs oreilles... Et de toutes les moqueries qui s'ensuivraient...
Je me mis à geindre : "Maman, s'il te plait, noooon, pardonne-moi, je ne veux pas la fessée. Pas ce soir, pas après le dîner..."
Elle haussa les épaules, et se mit à sourire, en voyant mes mimiques implorantes... Je ne sais pas si je l'avais convaincue, pas sur le fond en tout cas, puisqu'elle me coupa la parole en confirmant : "Christine, ce qui est dit est dit. Je te l'ai promise, tu auras la fessée et tu l'as bien méritée".
Mais, elle ajouta avec un petit air moqueur : "Allez, file dans ta chambre en attendant. Mais, d'ailleurs, si tu es pressée, on n'aura peut-être pas besoin de te faire languir jusqu'à la fin du dîner. Je vais conduire tes soeurs à leur cours et je reviens m'occuper de toi... Si tu veux que nous réglions cela entre nous, attends-moi en pyjama. Et prépare tes fesses, ma fille, prépare tes fesses !"

A SUIVRE 

1 commentaire:

  1. EN fait, vous n'avez jamais vraiment espéré y échapper, Christine. La fessée était annoncée, promise, inéluctable. Mais finalement votre maman vous fait un joli cadeau en vous permettant de la prendre seule à seule avec elle. Peut-être sera-t-elle plus sévère encore. peut-être vos fesses seront-elles encore plus rougies. Mais au moins vous n'aurez pas la honte de l'être devant le regard goguenard de vos soeurs. Je gage que vous allez vous dépêcher de passer votre pyjama et de vos préparer au retour de votre maman. Peut-être regarderez vous vos fesses encore balnches dans le miroir de votre salle de bain, en vous imaginant déjà quelle couleur elles prendront après la fessée ?

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