dimanche 15 octobre 2017

Chronique d'un redoublement : 121. De la fin des cours à une attente qui entretient la peur......

SUITE 120

Pour cette dernière nuit avant la fin de l'année scolaire, j'aurais dû avoir l'esprit tranquille, penser aux vacances, me dire que c'en était enfin fini de cette classe de Cinquième redoublée.
Mais la copie de maths à la signature maquillée avait ressurgi au coeur des liasses de devoirs et autres contrôles et compositions ramenés à la maison. Et, moi qui imaginais pouvoir régler cela sans dommage, pour peu que Maman n'y fasse pas attention, j'avais de gros doutes, du fait de l'attitude maternelle assez mystérieuse, et de ses menaces à peine voilées, sans pour autant en révéler le motif...
J'étais donc dans l'expectative, ne voulant surtout pas avouer spontanément si par hasard ce n'était pas le motif de la grogne de ma chère mère... Mais, en même temps, si elle avait découvert le pot aux roses, il était aussi logique qu'elle vérifie toutes les copies avant de me demander des comptes... Car, entre temps, j'aurais pu peut-être faire disparaître des preuves d'éventuelles autres falsifications...
Bref, au lieu de dormir avec la tête aux vacances, j'avais passé une nuit agitée, tentant d'imaginer ce que j'allais pouvoir dire si Maman avait tout deviné...
Même au réveil, je ressentis bien que cette dernière avait un regard plutôt renfrogné à mon égard. Et une communication très minimaliste.
Aline et Diane, elles, étaient guillerettes, ravies de finir l'année scolaire le soir-même. Diane, se rappelant que, pour ma part, je n'avais pas cours l'après-midi, commenta : "Ah la chanceuse de Christine. Dire qu'elle sera déjà en vacances ce midi".
Mais, Maman rétorqua d'une façon ironique : "Je ne suis pas sûre que ce soit une chance, moi !"


Aline et Diane m'estimaient "chanceuse" de ne pas retourner
en classe cet après-midi là...
Maman, croisant les bras, et nous regardant avec un air ironique,
et comme un petit sourire en coin, rétorqua que
ce n'était "pas forcément une chance..."
Voilà qui ne fit rien pour diminuer mon angoisse... Bien au contraire ! 

Je me gardai bien de demander pourquoi. J'avais trop peur que Maman ne réponde en distillant encore une de ses phrases en forme de menaces plus ou moins claires... Surtout que je voyais bien dans les regards maternels, qu'elle ne disait rien pour l'instant, mais se réservait sûrement un moment propice pour régler ses comptes...
Pour une fois, je suis partie au collège, heureuse de quitter la maison, tout en sachant que j'y reviendrais à midi, avec certainement plus d'angoisse...
Cette matinée me sembla bien courte, contrairement à d'autres jours, et nous ne travaillâmes guère, les profs eux-mêmes ayant les vacances en tête. Je récupérai les dernières copies non encore rendues, sans angoisse, car il n'y avait dedans ni trop mauvaise note, ni signature falsifiée...
Au dernier intercours, Brigitte et Babette s'amusèrent à me dire que "j'allais leur manquer" durant ces vacances, et me conseillèrent d'être "vraiment bien sage" pour "ne pas fâcher Maman, sinon..., sinon..." Et il n'y avait pas besoin de me faire un dessin, pour que je complète dans ma tête leur "sinon..., sinon..." !


Au dernier intercours, Babette et Brigitte, avec un rire moqueur,
me conseillèrent d'être "vraiment bien sage" pendant les vacances,
ajoutant que "sinon..., sinon..."
J'enrageais en devinant trop bien ce que signifiait ce sinon... 
 

Leur petit rire moqueur me glaça, et je cachai mon émotion, alors que remontait en parallèle la petite phrase de Maman, qui affirmait la veille que je "savais bien" ce qui "m'attendait"...
Babette me dit enfin qu'elle irait avec Brigitte et deux autres filles, cet après-midi là à la piscine, m'invitant à les rejoindre éventuellement... Je répondis que j'avais autre chose de prévu, sans préciser quoi.
Babette revint à la charge et proposa : "Si tu veux que ma mère appelle la tienne et qu'on passe te chercher". Je répliquai immédiatement que ce n'était pas la peine, car on devait aller chez le docteur. Ce n'était pas vrai, mais je voulais surtout éviter un appel de la mère de Babette, et que Maman ne réponde au téléphone que sa fille allait être punie, ni surtout qu'elle précise pourquoi et comment...
Je rentrai donc à midi en trainant les pieds, comme les jours d'arrivée d'un bulletin de colle, comme ces jours-là où, sans être parfaitement certaine que l'enveloppe venant du collège serait bien dans le courrier du jour, je savais bien qu'il y avait 99 chances sur cent qu'elle le soit, et que mes fesses s'en rappelleraient...


Je n'avais pas envie de rentrer à midi, même si c'était le début
des vacances pour moi. Je n'étais pas rassurée du tout, et traînassai 
comme je le faisais les jours où je craignais l'arrivée d'un bulletin de colle... 

De toute manière, là aussi, fausse signature découverte ou autre motif, je savais que Maman était fâchée, et que ce dernier jour de classe allait à l'évidence mal se terminer pour moi...
Mes soeurs étaient déjà à table quand je revins à la maison avec quelques minutes de retard... Maman me lança : "Pas très pressée de rentrer à la maison, ma grande ? Mais, ça peut se comprendre..."
Je baissai la tête sans répondre, me dirigeant vers l'escalier pour aller ranger mon cartable dans ma chambre. Maman m'arrêta : "Laisse donc tes affaires en bas. Il faut que je les regarde. Et, viens à table, ton entrée est servie".
Le repas passa sans allusions notoires, les petites étant à l'évidence plus bavardes et enjouées que moi... Maman me demanda de débarrasser la table, pendant qu'Aline et Diane montaient jouer en attendant l'heure de repartir à l'école. Pendant ce temps, Maman s'était servie une tasse de café qu'elle alla boire tranquillement dans le salon, non sans prendre au passage mon cartable qu'elle vida sur la table basse, se mettant à examiner cahiers et copies.
Je débarrassai donc, puis m'éclipsai, et montai dans ma chambre, ne voulant pas provoquer de réaction maternelle anticipée.
A 13 h 20, Maman appela du bas : "Allez, les filles, c'est l'heure, descendez donc !" 
Aline et Diane quittèrent leur chambre, et je descendis aussi, Maman n'ayant pas précisé "les petites" et imaginant peut-être qu'elle allait me demander de les accompagner jusqu'à leur école. Ou qu'elle allait vouloir que l'on s'explique...
Mais, ce n'était pas le cas, et en me voyant descendre à mon tour, Maman éleva le ton, montrant que son humeur n'était pas au beau fixe, c'est le moins qu'on puisse dire...
"Retourne donc dans ta chambre, Christine... Et, attends-moi là-haut... Je vais venir m'occuper de ton cas..." La menace devenait de plus en plus claire, et je tournai les talons pour vite remonter...


Maman m'ordonna de remonter dans ma chambre,
et de "l'attendre", ajoutant qu'elle allait venir
"s'occuper" de mon cas... Cela ne présageait rien de bon... 

Aline, qui avait tout entendu, demanda : "Mais, M'man, ça veut dire que Christine va être punie ?" 
Maman rétorqua : "Cela ne te regarde pas".  
Quant à Diane, elle s'aperçut qu'elle n'avait pas pris son sac de sport pour le dernier cours de gym de l'année, et elle remonta quatre à quatre les escaliers afin de le récupérer. J'étais restée sur le palier, en haut des escaliers pour guetter ce que pouvait dire Maman. Diane en profita pour me faire un petit geste très parlant de la main, me glissant à mi-voix : "Je ne sais pas ce que tu as fait, mais je suis sûre que ça va barder pour tes fesses..."
Je répondis en tentant de cacher mon angoisse : "Mais, non, mais non, tu te trompes, c'est juste une bricole, je te promets".
Mais, Diane n'en démordit pas, me chuchotant : "Mais je te dis que si. Moi, j'me trompe jamais. Tu vas encore avoir la fessée... J'arriverai bien à le savoir..."
Un "Diane, dépêche-toi, vous allez être en retard !", retentit du bas, et ma petite soeur me laissa en plan pour filer vers l'école...


Diane était remontée chercher son sac de gym, 
elle en profita pour essayer d'en savoir plus, 
en me prédisant que j'allais recevoir "encore la fessée".
Ce qui m'énervais, c'est que, jamais ou presque, elle ne se trompait...  

J'espérais surtout qu'elle n'allait pas confier ses déductions à ses copines de classe... 
En tout cas, je me serais bien passée de ses commentaires et de ses prévisions, car, hélas de hélas, je n'avais guère souvenance de fois où soeurette s'était trompée en la matière... Et, avant même que Maman ne dévoile ou ne confirme le motif de son courroux, une petite voix en moi me susurrait que j'allais devoir préparer mes fesses...
Bien sûr, je me disais que, cette fois au moins, si Maman agissait maintenant, mes soeurs n'entendraient, ni ne verraient rien...  Que, pour une fois aussi, je n'aurais pas à attendre l'heure du coucher pour présenter ma lune à la colère maternelle... Mais, rien n'avait encore été dit clairement, et j'avais la tête agitée de mille sentiments contradictoires, hésitant encore, si c'était bien ce que je pensais, s'il fallait avouer d'entrée ou jouer l'innocente...
Je tournais en rond, voyant mon air apeuré en me regardant dans la glace, et m'imaginant robe relevée, et culotte baissée, en travers des genoux maternels...
Mais, alors que je m'attendais à ce que Maman monte dès le départ des petites, il n'en fut rien, et les minutes passèrent. Dix, puis quinze... J'en eu assez de tourner en rond dans la chambre, et je m'arrêtai, m'asseyant sur le lit, prostrée, guettant le moindre bruit.
Par deux fois, je sursautai, mais le bruit venu du bas ne fut pas suivi de pas dans l'escalier.
Je vis mon réveil marquer 14 h, je poireautais donc depuis une bonne demi-heure, comme si Maman me laissait mijoter à souhait... Quand, enfin, je l'entendis monter dans l'escalier...

A SUIVRE 
 

6 commentaires:

  1. Tiens, tiens, pas de commentaire sur mes deux derniers épisodes... Que deviennent mes fidèles lecteurs ou lectrices ?
    Peut-être imaginaient-ils que le récit s'achevait avec l'année scolaire ? Mais, attention, il y a encore quelques surprises, et pas qu'agréables pour Christinette...
    Allez, les Sylvie, Mardohl, Anne-Sophie, Dominique et autres... J'espère votre retour...

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  2. Je ne m’attendais pas à ce que la suite débarque si vite. Vous êtes une rapide, lady Spaak. Pauvre Christinette, psychologiquement parlant, sa maman est douée pour faire monter la pression. Doit-on attendre la suite pour 2018 ? J'espère que la p'tite ado échappera à ce qu'elle craint le plus. Bise, talentueuse blogueuse.

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  3. Merci, cher Anonyme, de ce compliment sur mon "talent", comme vous dites. Pourtant je ne considère pas avoir été vite cette fois, et suis déjà prête à publier les suites de cet épisode... Mais, je laisse un peu de temps encore, aux plus fidèles de mes commentateurs ou commentatrices, ne doutant pas qu'ils ou elles auront des remarques, analyses ou ressentis sur l'action en cours...
    Cela dit, si, en me dédoublant, Christine peut se livrer à un pronostic sur l'avenir proche de Christinette dans ce récit, je ne suis pas sûre que je parierais sur une grâce maternelle soudaine...
    J'ai plutôt l'impression que mon angoisse d'alors risque de se concrétiser de manière claquante... Quitte à donner hélas raison au pronostic de Diane...
    Mais, chut ! je n'en dirai pas plus aujourd'hui, d'autant que, hi, hi, je suis la seule à connaître la suite...

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  4. L’inflexible mécanisme engagé lors du chapitre précédent se poursuit dans cet opus, narrant la dernière journée de ce redoublement, qui risque de connaître pour notre narratrice un douloureux épilogue.
    Ainsi, dès le petit déjeuner, votre mère poursuit sur ce ton ambivalent qu’elle a affiché dès la veille, en modérant devant vos petites sœurs le fait que vous ayez à vous réjouir de vos vacances anticipées. Voilà vos soupçons attisés, sans que ne vous soit encore délivrée la moindre certitude, aucune accusation précise ne vous ayant été adressée.
    Du coup, pendant votre dernière matinée, les ultimes sarcasmes de Brigitte et Babette prennent pour vous une dimension tristement prophétique. Pourtant, on remarquera que, loin de vous ostraciser, Babette vous propose tout de même de l’accompagner, à la piscine cet après-midi, pour fêter le début des grandes vacances. Hélas, votre grave bêtise, qui vous fait douter de ce qui vous attend à votre retour (et que vous osez d’autant moins avouer que vos rivales depuis plusieurs semaines ne cessent de vous chambrer précisément sur ce thème), vous empêche de profiter de cette aimable invitation, qui à l’orée de l’été, vous aurait éventuellement permis de vous rapprocher de vos camarades. (Ces fessées, décidément nuisent encore et toujours à vos liens relationnels.)
    Au terme de cette année scolaire, la cloche sonnée, loin de revenir chez vous la rue à vous, le cœur léger, pensant à chahuter ou à danser, laissant au tableau tous vos problèmes (remarquez la paraphrase du tube de Sheila), vous traînez les pieds, comme en l’une de ces tristes journées à l’issue desquelles vous rameniez une mauvaise note ou une colle.
    Vous retrouvez à la maison ce climat incertain, puisque votre maman vous assure qu’elle comprend que vous ne soyez pas trop pressée de rentrer, et vous réclame d’emblée vos dernières copies, sans doute pour traquer une autre éventuelle falsification.
    Après le repas, alors que vos petites sœurs s’apprêtent à repartir pour leur dernier après-midi, votre maman, d’une voix laissant éclater son courroux longtemps contenu, formule enfin sa sentence : vous devez remonter dans votre chambre et l’attendre, pour traitement d’un « cas ».
    En remontant chercher son sac de sport, Diane, dotée d’une intuition particulièrement aiguisée en matière de fessées (vous-même déplorez qu’elle ne s’est – hélas pour vous – jamais trompée dans ses prédictions), et sans doute en quête de revanche depuis la déculottée qu’elle a reçue devant vous, ne manque pas de vous glisser en jubilant qu’elle se doute bien de ce qui vous attend.
    En priant pour qu’elle n’aille pas divulguer cette prémonition à ses camarades et à vos rivales, vous vous retrouvez seule, dans une terrible expectative, assaillie par une foule de questions. Votre mère a-t-elle débusqué cette fausse signature ? Si tel est le cas, comment parviendra-t-elle à prouver la malversation ? Et dans l’hypothèse où elle le peut, comment serez-vous punie ? Vous ne doutez pas qu’une fessée vous attend, mais quelles en seront les modalités ? Comme vous macérez dans votre chambre, vous pouvez espérer que votre mère règlera votre compte dans l’intimité. Ceci dit, cette faute exceptionnelle appelle une peine exceptionnelle, et il n’est pas du tout certain que votre mère ne se contente d’une « simple » fessée entre quatre murs. Peut-être vous (et nous) réserve-t-elle une surprise inaccoutumée, à la mesure de la gravité de votre délit.
    C’est ce que le lecteur, en même temps que la malheureuse Christine, ne tardera pas à apprendre, les pas résolus de votre mère dans l’escalier annonçant le terme de votre anxieuse attente.

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  5. Gâtée, très gâtée, je suis, je dois bien l'avouer...
    Quel commentaire "mardohlien" ! J'en reste sans voix ! Je ne peux que souscrire à toutes les remarques et analyses du maître en la matière.
    J'en suis même à hésiter entre rebondir sur quelques points où je pourrais apporter des précisions, et l'envie de poursuivre le récit, tant le commentaire ci-dessus est bien dense et se projette déjà dans la suite...

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  6. Petite remarque pour Mardohl, à propos de l'apparente gentillesse de Babette et Brigitte, promptes à m'inviter à les accompagner à la piscine. Elle est compréhensible cette gentillesse, car les moqueuses n'ont pas de réels griefs contre Christinette. Je n'ai jamais vraiment été en conflit ouvert avec elles. J'aurais aimé parfois pouvoir leur rendre la monnaie de leurs moqueries, mais j'avais peur qu'elles se vengent en se moquant plus encore...
    Me prendre dans le bon sens, comme m'inviter à les rejoindre à la piscine était aussi à l'évidence un moyen de rester en contacts, d'avoir des nouvelles durant les vacances, bref de se tenir au courant de ce que je pouvais faire, et surtout de ce qui pourrait peut-être m'arriver durant ces deux mois...

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