mardi 28 juin 2011

Le beau temps ne dure pas éternellement... (2) Donner le change, ne rien laisser paraître

SUITE 1

Maman avait bien comme un sixième sens. Elle lisait dans nos pensées et comprenait quand quelque chose n'allait pas.  J'avais toujours été impressionnée par son sens de l'observation, mais je comprends avec le temps qu'il devait être facile de ressentir les troubles et angoisses de son petit monde, dès l'instant où elle nous avait mis au monde et devait, rien qu'à la façon dont nous respirions deviner si quelque chose clochait.
Sa réflexion en me voyant pensive sur le muret du fond du jardin en était la preuve, et elle m'avait alertée. Si je ne voulais pas qu'elle cherche trop les raisons de mon malaise, mieux valait donner le change et jouer au mieux la fille innocente...


Pas facile, pas facile, cette tâche-là... Surtout quand mes réflexions ne me laissaient plus guère de doute sur mon avenir postérieur...
Le soir, j'avais endossé le rôle de l'ainée serviable. Je m'étais proposée pour mettre la table, et j'avais débarrassé sans rechigner, restant en bas, au lieu de filer dans ma chambre, montrant que je pouvais encore rendre service si nécessaire.
"Merci Christine. Non, tu peux monter. Je vais juste passer un coup de serpillère et tout sera nickel. Je te trouve bien disposée, ma fille. J'espère que tu n'as rien à re reprocher...", commenta Maman.
Je protestai avec une force qui lui a sûrement paru suspecte. "Ah, mais non, mais non, Maman. Je veux juste t'aider".
Assise sur le canapé du salon, elle rétorqua en levant un doigt menaçant : "C'est bien, Christine. Mais, je me méfie quand même. Je sais bien d'expérience que lorsque cela fait quelque temps que tu n'as pas fait des tiennes, il faut s'attendre à de nouveaux exploits... J'espère pour toi que ce n'est pas le cas et surtout que tu ne me caches rien... Tu sais combien je déteste les mensonges, ma chérie. Je serais à ta place, je réfléchirais bien avant d'en faire... Sinon... Sinon... je ne te fais pas de dessin, Christine..."



Je suis montée dans ma chambre sans rien rajouter. Je voulais surtout cacher mon angoisse. J'avais le sentiment que Maman avait tout deviné et que je n'avais pas saisi la perche qu'elle me tendait. La franchise aurait peut-être adouci sa colère, modérer la réaction qu'elle aurait en connaissant mon dernier "exploit" comme elle disait...
Mais, on ne se refait pas. J'étais repartie dans une spirale d'enfermement dans mon besoin de gagner du temps.
Quand Maman est venue nous dire bonsoir et éteindre dans nos chambres, je l'ai embrassé comme d'habitude, mais j'étais à deux doigts d'éclater en sanglots. Heureusement, dans la pénombre, elle ne vit pas mon visage.
Au moment où elle quittait la pièce, j'ai eu un sursaut d'hésitation. J'ai dit : "Euh, Maman..."
Elle s'est retournée et m'a demandé "Quoi, Christine ?".
L'autre partie de moi a rétorqué : "Euh, non, euh, rien, euh, bonne nuit, Maman..."
Je pense que si elle était revenue s'asseoir au bord de mon lit et m'avait demandé : "Qu'est-ce qu'il y a ma chérie ? Tu veux me dire ce qui te chagrine. Allez, raconte à Maman", il est possible que je me sois confiée. J'étais tellement au bord de l'aveu.
Mais, ma nouvelle dénégation lui a suffi et elle a refermé la porte derrière elle.
Je me suis retrouvée dans l'obscurité. J'avais chaud, comme mal au ventre, l'estomac noué par cette tension nerveuse.
Je me trouvais bête et idiote d'avoir tergiversé, mais j'avais aussi le sentiment que c'était une petite victoire de voir ce samedi passer, cinq semaines juste après ma dernière fessée. Demain serait un autre jour, nous allions passer la journée chez Mamie, cela permettait d'espérer gagner encore un jour aisément. Au moins étais-je sûre que les discussions à la table familiale ne tourneraient pas autour de la fessée que j'aurais pu recevoir ce soir. Finalement, cet argument-là me plaisait vraiment et me consolait de mes tergiversations. Je m'endormis en pensant rassurée que c'était mieux ainsi, et qu'il valait mieux en effet que je sois la seule à savoir qu'une fessée m'attendait prochainement. La seule à le savoir vraiment, même si je devinais que Maman s'en doutait également un peu...

A SUIVRE

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