mardi 23 juin 2015

Chronique d'un redoublement : 86. De comment j'avais connu Babette, à une bonne note mais pas pour elle

SUITE 85

Les confidences de Maman à Mme Vitez m'ont fait cauchemarder une bonne partie de la nuit. J'étais certes habituée à ce que mes "exploits" soient l'objet de confidences sur le plan familial et des amis proches, voire du voisinage. Mais, là, cela tombait mal, en touchant la mère d'une camarade de classe que je n'appréciais guère.
Et, surtout, poussée par les questions de son hôte, qui semblait vouloir tout savoir, Maman n'avait rien caché ni de sa méthode, ni du dernier épisode qui se trouvait être un des plus marquants de l'année...


 Poussée par les questions de Mme Vitez, 
Maman avait justifié sa méthode en ne cachant rien
du dernier épisode où j'avais été déculottée
et fessée au salon devant mes soeurs...
Je rougissais de loin en écoutant ces confidences gênantes...


Quand bien même Maman aurait juste dit à Mme Vitez que ses filles recevaient encore la fessée, et que cela arrivait encore à son ainée par une explication à deux le soir au moment du coucher, j'aurais déjà eu du mal à cacher ma honte. Mais, là, cela ne pouvait guère tomber pire, en survenant peu après une déculottée magistrale administrée devant mes soeurs au milieu du salon.
Et si vous ajoutez que Maman avait précisé que ce n'était pas un cas isolé, que c'était parce que la fessée pour la colle précédente n'avait à l'évidence pas suffi, et que de ses trois filles j'étais la plus souvent servie, cela ne me permettait plus de faire croire que c'était un événement exceptionnel si le sujet de conversation revenait devant la mère de Babette, et évidemment devant sa fille à qui elle allait peut-être raconter tout ou partie des confidences de Maman Spaak.
Je me rappelle qu'un jour en vacances, j'avais été menacée d'une fessée devant une copine de plage, et je lui avais fait croire que c'était une menace plus ou moins en l'air, qu'il n'y avait plus que mes soeurs qui y avaient droit. Et comme un autre rappel à l'ordre maternel avait suivi quelques minutes plus tard, j'avais dû concéder que cela arrivait encore, mais deux ou trois fois par an seulement...


Non seulement, Mme Vitez savait que je recevais encore la fessée,
mais que c'était fréquent et "nécessaire" selon Maman
qui croyait en les vertus d'une bonne déculottée,
même, pour ne pas dire surtout pour son ainée...


Cette fois, les confidences n'avaient rien omis et je priais dans ma tête pour que Mme Vitez n'en dise pas trop à sa fille...
Babette, je la trouvais "bête", cela rimait et on en pouffait entre copines dès la première année où je l'ai connue. C'était à l'entrée en Sixième. Elle arrivait d'une autre école primaire de notre ville et faisait grande godiche à mes yeux, surtout que j'avais un an de moins qu'elle, ayant sauté une classe de maternelle.
Comme elle, notre première année de collège ne fut pas terrible, mais j'étais passée en Cinquième surtout grâce à l'intervention de Maman qui promettait que je travaillerais mieux, Babette redoublant de son côté.
Je me suis ainsi retrouvée une classe au dessus d'elle durant ma première Cinquième, et j'avoue que nous nous moquions parfois d'elle, avec le sentiment d'être dans la classe d'au dessus par rapport à elle.
Or, comme on le sait depuis le début de cette chronique, mon comportement insouciant, ma propension à faire le clown, et des résultats en dents de scie ont fait que j'ai perdu mon année d'avance en redoublant à mon tour, ce qui fait que j'ai retrouvé Babette dans ma deuxième classe de Cinquième, et nous ne nous sommes jamais réconciliées vraiment.
Chacune avait son petit clan d'amies, Babette en ayant plus que moi du fait qu'elle était avec les mêmes depuis sa seconde Sixième.
Bref, sans être ennemies, nous n'avions pas d'atomes crochus et nous nous ignorions plutôt. Et puis, en recherchant dans nos souvenirs, je me rappelais qu'une des premières fois où j'avais récolté deux heures de colle, c'était une punition collective pour bavardage touchant quatre élèves de la classe, dont Babette et moi. Et je me souvenais bien qu'elle était revenue le surlendemain en cours en rageant parce que sa mère, à titre de punition, l'avait en conséquence privée d'aller à l'anniversaire de sa voisine de classe. 
Elle trouvait cela injuste d'être punie une seconde fois, et s'épanchait auprès de ses copines pour qu'on la plaigne... Si on l'écoutait, c'était elle la victime, celle qui était condamnée à une double peine, et que nous aurions dû soutenir en lui remontant le moral...
J'avoue que j'avais eu du mal à faire semblant de la plaindre. Au fond de moi, j'en étais presque jalouse et je me morfondais en secret en me disant que c'était moi qu'il fallait plaindre et pas elle...
Mais, je préférais à l'évidence garder tout cela pour moi, imaginant trop bien quelle aurait été la réaction de Babette et de la classe si j'avais expliqué quelle avait été ma réception à la maison la veille au soir... Car, moi aussi, j'avais subi le sermon maternel, malgré mes explications arguant qu'il s'agissait d'une punition collective, et que ce n'était pas moi qui bavardait le plus, etc., etc.
Rien de mes demandes de pardon, de mes supplications, ni de mes promesses de ne plus bavarder n'avait réussi à faire changer la détermination maternelle, bien décidée à appliquer la seule méthode qui, selon elle, nous ramenait dans le droit chemin...




Ce jour-là, en Sixième alors que Babette était privée de goûter anniversaire
à cause d'une colle collective, j'avais eu droit, avant de me coucher, 
à une fessée maternelle magistrale...
Je n'allais surtout pas le dire à mes camarades, ni tenter de me faire plaindre...

Alors, il est facile de comprendre que, devant une Babette se plaignant d'être privée d'un goûter anniversaire, je n'allais pas expliquer que moi, Christine, je m'étais retrouvée étendue sur les genoux maternels, culotte baissée pour une fessée magistrale... J'aurais eu trop peur que Babette et toute la classe ne se moquent de moi... Même si d'autres étaient soumises à un régime similaire, personne ne s'en vantait...
Alors, si je me souvenais bien de cette scène où Babette se plaignait en Sixième, je ne pouvais que vivre mal le fait que, deux ans plus tard, mes mésaventures fessières aient été détaillées à la mère de Babette, imaginant bien que l'histoire risquait de prendre un tour qui me faisait angoisser à l'avance...
Le lendemain, je suis retournée en classe, en tendant le dos, me demandant bien si Mme Vitez avait ou non évoqué les méthodes de Maman avec sa fille...
Moi qui étais peu portée à fréquenter Babette, qui l'ignorais plutôt, je me suis mise à l'observer, à m'arranger pour être proche d'elle quand elle discutait avec d'autres, car je ne voulais pas être prise au dépourvu, et laisser se propager une rumeur dans mon dos. Et même si tout était vrai, j'étais bien décidée à nier l'évidence et à ne surtout pas admettre ce qui pourtant n'était que vérité vraie...
Quelques jours passèrent toutefois, et je commençai à être rassurée. Mme Vitez avait dû garder les confidences maternelles pour elle seule. Je pensais bien qu'elle n'avait certainement pas oublié ces confidences de ma chère mère, mais il est vrai qu'elle n'avait pas de raison particulière de se précipiter pour mettre Babette dans la confidence. Surtout si elle n'avait rien à reprocher à sa fille...
De mon côté, la confiance revenait donc, et un 16,5 sur 20 obtenu en sciences naturelles  (une matière qui ne me passionnait pas trop, car c'était surtout des choses à apprendre sans réfléchir), me ramena le sourire et les félicitations maternelles, derrière lesquelles je voyais bien qu'elle attribuait une part de cette bonne note à une certaine récente déculottée magistrale et démonstrative...




Mon 16,5 ravissait Maman, mais je sentais bien
qu'elle se félicitait d'avoir sévi récemment, 
et de m'avoir allongée sur ses genoux
pour une tannée devant mes soeurs...
Pour elle, cela m'avait assurément assagie... 

Maman était contente, et je savais même que le carnet de notes de fin mai, l'avant-dernier de l'année, qui arrivait dans deux ou trois jours, ne poserait pas de problème. Après, sur la lancée, il n'y aurait plus qu'à passer le dernier mois et en finir enfin avec cette année de redoublement.
Ravie de cette bonne note, je me vantai d'avoir eu la deuxième meilleure note, seule Claire ayant eu un 17. Maman m'interrogea sur les autres filles qu'elle connaissait et j'étais fière de montrer que j'avais eu un meilleur résultat, non sans que Maman minimise en disant que, pour une redoublante, c'était assez normal d'être dans les meilleures...
Maman me demanda aussi : "Au fait, quelle note a eu Babette ?" et je m'entendis dire d'un ton enjoué : "Pas terrible. Elle n'avait pas révisé sa leçon, et elle a récolté un 3 sur 20" !
Le regard de Maman brilla, comme si elle était soulagée que ce ne soit pas moi qui avais récolté la plus mauvaise note de la classe. Elle commenta avec un petit air presque amusé : "Ah, j'en connais une qui ne va pas être contente. Pauvre Mme Vitez... Je me demande bien comment elle va réagir... J'aimerais bien savoir..."
Je ne me risquai surtout pas à commenter, imaginant que cette pimbêche de Marie-Elisabeth s'en sortirait encore avec quelques soirées sans télé, ou je ne sais quoi de bénin...  J'étais surtout contente que ce ne soit pas moi la dernière au 3 sur 20, car je savais trop bien comment Maman aurait réagi, et j'aurais sûrement déjà été en train d'attendre dans ma chambre ma prochaine déculottée...
J'y repensai, le soir en m'endormant, tentant d'imaginer Mme Vitez donnant la fessée à Babette, mais les images qui me tournaient dans la tête ressemblaient plus à Christine sur les genoux maternels, tellement je n'arrivais pas à y croire...




En repensant à la note de Babette, j'essayais d'imaginer Mme Vitez suivre
les conseils maternels en corrigeant cette pimbêche.
Cela m'aurait tellement plu, tellement soulagée...
Mais, les images qui me venaient étaient faites à partir de mes souvenirs...
C'était une de mes fessées qui me revenait en tête,
c'était moi qui frissonnais quand ma culotte glissait vers le bas,
c'était mes fesses qui rougissaient sous la claquée magistrale...
 


La chose qui me tarabustait aussi les méninges, était la phrase de Maman  : "J'aimerais bien savoir", en parlant de la réaction de Mme Vitez, ce qui pouvait faire entendre que le sujet reviendrait dans les discussions maternelles, et cela ne me rassurait guère...

A SUIVRE 

7 commentaires:

  1. Eh bien ... nous aussi, en fait, on aimerait bien savoir, en fait.
    La maman de Chrstine a-t-elle fait une émule?
    La pauvre Babette a-t-elle subi le même sort que Christine?
    Et, si oui, l'en tiendra-t-elle pour responsable?
    Quel suspense insoutenable pour nous, pauvres lecteurs!

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  2. Suspense en effet... La suite au prochain numéro, avec les sentiments mêlés de Christine. Elle ne croit guère que Mme Vitez change ainsi radicalement, mais elle aimerait bien. Elle voudrait surtout savoir, sans que personne d'autre ne sache rien, ni des possibles ennuis de Babette, ni du rappel des siens... Et elle n'a pas envie non plus que la discussion entre les mères reprennent sur le même sujet...

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  3. Christine, j'aime bien vos recits. Merci beaucoup!

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  4. Ce chapitre s’étale sur un thème que je trouvais jusqu’alors sous-traité dans votre blog : celui du tabou absolu que représente la fessée entre copines (mais pas entre mères, malheureusement), tout en comparant en corollaire et filigrane les différents traitements auxquels sont soumises les camarades de Christine.

    Notre narratrice n’aborde évidemment jamais ce sujet avec les amies de son âge. Quand il vient à être évoqué, comme vous le rappelez dans cette analepse estivale, vous en niez l’évidence en bloc, et quand cela n’est plus possible, vous le minimisez autant que possible. (Comme vous l’avez fait avec Anne, dans l’épisode 8 de « La malade imaginaire », le jeudi 21 octobre 2010.)

    Vous reconnaissez cependant (et je crois bien que c’est la première fois) que vous n’êtes pas la seule à recevoir la fessée : « d’autres étaient soumises à un régime similaire » tout en précisant que les concernées se taisent là-dessus, par crainte de moquerie (réaction que vous n’imaginez que trop bien).

    Oui, mais toutes ne la reçoivent pas, ce qui est le cas de Babette, dont vous jalousez les punitions à vos yeux si légères (privation de sortie, de télé). Comble d’injustice, elle se plaint à la cantonade d’une telle sanction, que pour votre part vous assumeriez volontiers, alors que votre fierté vous empêche de vous plaindre, vous, de la peine autrement plus douloureuse, plus mortifiante, plus infantilisante, que vous avez subie pour le même motif.

    Aussi, l’inopportune ampleur de la confidence que Madame Spaak a prodiguée à Madame Vitez, et que vous rappelez en début d’épisode (aveux n’ayant omis aucun détail embarrassant : déculottée intégrale, présence des petites sœurs, rougeur des fesses) risque de briser cet inviolable secret. Comble de malchance, cette révélation a atterri dans les oreilles de la mère d’une camarade que Christine n’apprécie guère (Babette la bêbête), prenait de haut quand celle-ci avait redoublé, avant de se voir, à l’issue de son propre recalage, scolairement rejointe par elle. (Ce qui nous apprend à ne jamais nous moquer du malheur des autres, car qui sait ce que la vie nous réserve.)

    Comme les deux filles s’ignorent, fréquentant chacune un groupe différent, Babette ayant l’avantage numérique, nul doute que, si cette dernière se trouvait informée de l’anecdote, elle s’en emparerait sans vergogne pour en instruire ses amies et faire de Christine la risée de la classe (en réponse légitime aux pouffements dont notre héroïne s’est bien inconséquemment fendue à son égard lors de la sixième).

    Raison pour laquelle, Christine, inquiète, se met à observer sa camarade, craignant qu’elle ne propage une rumeur à son sujet. Mais rien de cela ne se passe et notre héroïne s’en tire avec un sursis. Sursis provisoire, auquel pourrait mette fin cette note en sciences naturelles. Vous vous réjouissez de votre excellent résultat, tout en trouvant plaisante la mauvaise performance de Babette, jusqu’à ce que votre mère ne remette la pendule à l’heure : à l’issue de cette catastrophique évaluation, Madame Vitez risque bien de faire savoir à sa fille à quel régime est soumise sa camarade Christine, ne serait-ce que pour l’en menacer… avec toutes les conséquences qu’on imagine pour votre réputation en classe !

    C’est sans doute tourmentée par cette perspective que, le soir, essayant d’imaginer Babette sur les genoux de sa mère, Christine ne parvient qu’à produire des images qui la mettent, elle, en scène pour la fessée. Car, que Madame Vitez ait décidé de suivre rigoureusement l’exemple de Madame Spaak, ou qu’elle n’en ait que prévenu sa fille, cette dernière ne manquera pas de s’en venger sur celle qui a provoqué son infortune, même si ce fut à son corps défendant : « Si cette pimbêche de Christine ne recevait pas la fessée, jamais ma mère ne m’en aurait menacé. Ah, qu’elle compte sur moi pour lui ruiner sa réputation, et la faire passer pour une petite fille, pour l’apprendre à prendre ses grands airs devant moi. »

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  5. Mardohl tient ses promesses et j'en suis ravie, hi, hi... Ce qui était moins le cas quand Maman tenait les siennes...
    Sa remarque est pertinente : autant les mères peuvent discuter et échanger à propos de leurs méthodes, autant celles qui les subissent préfèrent cacher leur ressenti, ne rien dire de ce qu'elles subissent, surtout quand cela peut devenir objet de moquerie.
    Entendre Babette se plaindre d'une privation de télé pour deux heures de colle, en devient alors plus difficile à supporter pour Christine. En effet, je ne me voyais pas aller dire devant la classe : "Dis donc, Babette, tu as bien de la chance, car chez moi, cela n'a pas été la même musique... Maman m'a envoyée l'attendre dans ma chambre après le dîner. Et, quand elle est venue, elle m'a flanqué une bonne fessée, et pour ne rien te cacher, elle m'a déculottée comme une gamine de six ans. Alors, tu vois, je suis plus à plaindre que toi..."
    Non, bien sûr, je préférais ne rien dire, en priant pour qu'aucune de mes copines ne l'apprennent. Tout comme évidemment je n'aurais jamais avoué à mes camarades que Maman m'avait bien prévenue que toute nouvelle colle me vaudrait au moins la même déculottée...
    Quant à ce que risque de penser Babette si sa mère lui révèle comment Maman agit, ce qu'en imagine Mardohl est tout à fait ce que je crains...

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  6. Quant à la référence de 2010 et du récit du Malade imaginaire, elle montre bien que j'avais déjà évoqué ce genre de situation, qui n'est pas arrivée souvent, du fait de ma tendance à garder le secret. Mardohl aurait voulu alors que j'en dise plus. Je vais tenter de le faire cette fois, la situation étant effectivement très proche, puisque démarrant d'une confidence maternelle, alimentée en prime par les racontars de Diane notamment...

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