vendredi 1 octobre 2010

Mes ruses de Sioux : la malade imaginaire (3)

SUITE 2
Maman était en haut de l'escalier quand le téléphone sonna... Elle s'arrêta devant ma porte de chambre et me dit : "Christine, prends donc ta température. Je réponds et je reviens"
C'était trop beau. Le coup de pouce du destin, j'en étais persuadée, la possibilité de valider ma fausse fièvre sans me faire repérer.
Je pris donc le thermomètre et le plaçai en bonne position, sous les draps.
Maman était redescendue pour rien. L'appelant avait raccroché avant qu'elle n'arrive au combiné. Elle remonta et me demanda si j'avais fait ce qu'elle avait demandé. Je dis oui, sans me presser, prétextant que la minute n'était peut-être pas passée...
Maman patienta trente secondes et souleva le drap pour m'ôter le thermomètre elle-même...
Elle le regarda en faisant la grimace et en me mettant la main sur le front.
"38°4 encore ! C'est quand même beaucoup. Tu es sûre qu'on l'avait bien remis à zéro ?", s'interrogea Maman. Je lui rappelai qu'elle l'avait fait elle-même, mais elle restait sceptique...

Maman était sceptique...








   
Le téléphone sonna à nouveau et Maman quitta la pièce rapidement pour ne pas manquer encore l'appel. J'étais à moitié rassurée et je commençais à croire en ma chance...
Mais l'écho de la conversation en bas changea mon optimisme en angoisse...

Ce que j'entendais me faisait paniquer...

 C'était Anne ma voisine de classe qui venait aux nouvelles. "Oui, c'est gentil de t'inquiéter, Anne... Oui, Christine est souffrante et on attend le docteur. J'allais t'appeler pour te demander de passer après les cours pour dire à Christine s'il y a des devoirs. Peut-être y en a-t-il déjà de ce matin qu'elle pourrait étudier à la maison ?"
Les questions de Maman étaient naturelles, mais je tremblais qu'elle n'apprenne de quoi alimenter sa méfiance.
Anne répondit, mais je n'entendais que la voix de Maman qui répétait :   "Oui, il faudra voir le texte de Rabelais en français. Et puis, tu dis ? La leçon 23 en anglais. (...) Ah oui, le contrôle... Quel contrôle déjà ? (...) Ah, d'accord... Oui, tu n'as qu'à passer ce soir après les cours... Enfin, si... si Christine est encore absente... Donne le bonjour à ta maman. Et merci encore..."
J'avais bien entendu. Elle avait dit : "Si Christine est encore absente..." Je n'allais pas tarder à savoir ce qu'elle entendait par là...
Elle avait l'air très énervée en remontant dans ma chambre... "Donne-moi voir ce thermomètre, Christine. On va vérifier si il marche bien... Et devant moi cette fois..."
Je protestai mais mieux valait faire profil bas. Maman dégagea les couvertures, me fit me retourner et baissa mon bas de pyjama pour introduire l'instrument...
"Mais, Maman, pourquoi, pourquoi ?", questionnai-je en jouant l'innocente.

"Christine, c'est à moi de poser des questions et de te demander pourquoi tu ne m'as pas dit que Mlle Paule avait annoncé un contrôle d'anglais pour ce matin ? Je vois bien la manoeuvre d'une comédienne qui n'a pas envie de travailler... On va le savoir tout de suite... De toute manière, tu n'as pas de chance, Christine, car Mlle Paule a eu une inspection surprise ce matin et elle a fait cours normalement. Le contrôle est reporté à dans deux jours..." ajouta Maman qui comprit en me voyant blêmir qu'il y avait bien anguille sous roche...
 
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 Maman retira le thermomètre et le regarda avec une bouche pincée....

"J'avais deviné..." lança-t-elle. "37°4, Mademoiselle nous a joué une scène du malade imaginaire. Mais, ce n'est pas possible... Tu cherches vraiment les ennuis".
Je tentai de nier : "Maman, je t'assure, je suis malade, j'ai mal au ventre. C'est juste la fièvre qui est tombée".
Elle me répondit par une gifle magistrale. "N'aggrave pas ton cas, Christine. Tu te fiches du monde. Mais ce n'est pas mal au ventre que tu vas avoir, crois-moi... Tu t'en souviendras de ta comédie..."
En bas, le minuteur de la cocotte venait de sonner. Maman m'extirpa du lit et m'ordonna : "Christine, tu te rhabilles immédiatement et tu iras en cours cet après-midi. Je descends à la cuisine et je vais aller appeler le médecin pour qu'il ne passe pas. Qu'est-ce qu'il va penser de nous ?"



Au passage, elle me distribua deux retentissantes claques sur le fond du pyjama. Et elle répétait : "Ah, tu vas me le payer cet affront. Dépêche-toi de t'habiller et descends nous rejoindre... Tu vas comprendre ce que c'est que d'avoir de la fièvre..."

(A SUIVRE)

4 commentaires:

  1. Et ce qui devait arriva. Et tant s'en est allée la cruche à l'eau que telle fut prise dimanche qui croyait rire vendredi (ou quelque chose d'approchant).
    Double catastrophe pour Christine, qui non seulement voit sa simulation démasquée, mais qui en plus n'a même pas manqué ce redouté contrôle d'anglais, reporté à dans deux jours. Perdante sur toute la ligne. Vraiment, elle joue de malchance, notre infortunée damoiselle, et vos récits ne seraient pas désavoués par les moralistes, pour qui toute tromperie est vouée à l'échec, tout comme le diable est éternellement perdant dans les mystères médiévaux. (Il faut dire aussi qu'à l'instar de la "ségurienne" Sophie, les stratagèmes de Christine ne brillent pas par leur finesse. On en revient au principe de la supériorité cognitive du bien sur le mal : les personnes animées de mauvaises intentions manquent forcément d'intelligence et destinent ainsi leurs manigances malhonnêtes à l'échec.)
    Enfin... quel que soit le poncif littéraire que vous avez activé, Christine se trouve à présent à l'orée d'une punition magistrale. Je vois venir une fessée exemplaire devant ses deux sœurs hilares, qui la fera se tortiller douloureusement sur sa chaise, l'après-midi à l'école, suscitant l'interrogation de ses camarades.

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  2. Merci chère Christine pour cette série si finement distillée... Vous devez nous trouver bien gourmands d'attendre ainsi la suite de vos malheurs, mais c'est que vous racontez si bien.
    Mardohl a raison, vous êtes une Sophie moderne. sauf que Sophie, si j'ai bonne mémoire, se faisait toujours pincer, mais avait une maman moins fesseuse. je ne parle pas de sa cruelle belle-mère que l'on trouve dans "Les Petites Filles modèles", mais bel et bien dans le premier volume de ses aventures. Il faut croire que votre maman croyait davantage dans la punition claquante que la mère de la jeune Sophie. Vu votre talent pour les raconter (au passage j'aime beaucoup le choix de vos photos sur les billets) e n'est pas moi qui vais m'en plaindre... Nous attendons le (4) avec impatience...

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  3. Patience, patience... La suite arrive... Mais, vous comprendrez que je ne sois pas pressée de rejoindre Maman, ni d'affronter le regard de mes soeurettes qui ont vite compris mes exploits et qui imaginent déjà la suite...

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  4. A propos de vos sœurs, Christine, il ne vous ai jamais arrivé d'être fessées de concert ? Je suis sur que votre maman serait tout à fait capable de s'occuper successivement de trois pairs de fesses. Et j'imagine bien l'ainée restant fesses nues nez au mur tandis que maman s'occupe des fesses de ses sœurs. Avec menace "si tu te retourne, tu repasse sur mes genoux, Christine !"

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